Information et propagande en temps de guerre : les médias
et la guerre du Vietnam.
La guerre du Vietnam est un conflit périphérique de la Guerre froide. A la suite de
l'indépendance arrachée à la France en 1954, le Vietnam est divisé entre un
Nord communiste et un Sud pro-occidental. Mais le sud est agité par une guerre civile animée par le Vietcong soutenu
par le Nord. Utilisant l'affaire de la baie du Tonkin ( août 1964) au cours de
laquelle des navires américains sont bombardés par les Nord-Vietnamiens, l'armée
américaine intervient ouvertement dans
le conflit à partir de 1964 pour soutenir le sud-Vietnam.
Les médias ont ils joué un rôle dans ce
conflit ? Sont-ils responsables de son
issue ?
I Oui
car les médias ont effectivement été utilisés dans les deux camps au début du
conflit
a) L'armée américaine laisse les
journalistes faire leur travail.
Convaincue, de mener une guerre juste pour la liberté contre la tyrannie dans le cadre de la
Guerre Froide, les autorités
américaines laissent les équipes de reporter travailler librement. Ceci explique la quantité d'images dont on
dispose sur ce conflit. Dans ces
conditions l'auteur Dan Hallin, note que dans un
premier temps la télévision américaine donne du conflit une "image
positive". Cependant, la liberté d'action des journalistes sur place
permet des reportages qui font scandales auprès d'une opinion publique non
préparée : Morley Safer, Cam Ne, CBS, 1965.
b) Les Nord-Vietnamiens et le Vietcong entendent bien utiliser les médias à leur profit.
Le Vietcong et le Nord-Vietnam
sont en situation d'infériorité
militaire face aux EU et à l'armée du Sud-Vietnam. Dans ces conditions,
tous les moyens sont bons pour enliser le conflit et affaiblir l'adversaire.
Cela se traduit par des techniques de guérilla
mais aussi par de la guerre
psychologique et de la guerre de
l'information. Les photographies de soldats américains capturés sont
largement exploitées par la propagande
nord-vietnamienne. C'est le cas de la photo de la capture du soldat Lai William
A. Robinson, le 10 septembre 1965. On le voit transféré par une combattante vietcong de 17 ans : Nguyen Thi
Kim. Cette image figure ensuite en juin 1967, sur un timbre nord-vietnamien
édité pour fêter la destruction du 2000ème avion américain. Le clché du photographe est-Allemand
Thomas Billhardt du pilote Dewey Wayne Waddell capturé en juillet 1967 est aussi exploité par les
nord-vietnamiens. Ces images symbolisent
à elles seules pour le monde entier ce qu'est une guerre asymétrique. En 1968, le peintre français Gilles Aillaud s'in
spire de ces deux photographies pour peindre « Vietnam.
La Bataille du riz ».
Propagande : action de diffuser
et de faire admettre uen idée , une politique , une
doctrine afin d'influencer l'opinion.
Guerre asymétrique : conflit
opposant des forces déséquilibrées en puissance et différentes par leurs
organisations. Exemple : guérilla
opposant un groupe limité de combattants sous équipés mais très mobilisés à une
armée régulière de type colonial ou impérialiste.
c)
Les débuts de la contestation.
Dès l'automne 1964, à Berkeley en Californie,
le Free Speech Movement
remet en cause l'intervention américaine au Vietnam. Certains étudiants
estiment que les enjeux du conflits ne méritent pas leurs vies. Pour les
militants des droits civiques, les jeunes noirs n'ont pas à aller se battre
pour une cause qui n'est pas la leur. Par la suite les manifestations se
multiplient. C'est à l'occasion de l'une d'entre elles que le photographe
français Marc Riboud prend le fameux
cliché de la jeune fille à la fleur qui
devient une icone pacifiste dans le monde entier. Pour écouter une chronique
sur le sujet .
II Oui car ils ont
aidé à révéler les réalités de ce conflit,
a)
...notamment en diffusant des images gênantes.
La présence de nombreux journalistes permet
de connaître la réalité de ce conflit asymétrique. Ainsi, les américains voient-ils
dans les journaux et à la télévision les body-bags dans lesquels sont transportés les soldats
américains.
b)
L'offensive du Têt est un tournant
dans le conflit et dans la guerre de l'image.
L’année 1968 est un tournant dans
le conflit. En janvier, le Nord-Vietnam lance une vaste offensive. Même si
c'est un échec, l'offensive du Têt (nouvel
an vietnamien) lui permet de s'avancer
loin vers le Sud jusqu'à Saigon. L'opinion américaine est choquée. Les
assurances données par les autorités sur les faiblesses du Nord-Vietnam et sur
l'issue rapide du conflit sont démenties
par les faits. C'est dans le contexte des combats dans Saigon, qu' Eddie Adams
prend une photo célèbre publiée à la une
du New York times, le 2 février 1968. On y voit le général Nguyen Ngoc Loan de l'armée Sud Vietnamienne
tirer sur un prisonnier en civil. Cette scène d'exécution sommaire donne à
l'opinion publique américaine le sentiment que les EU sont engagés dans un
conflit au côté d'un camp qui ne respecte pas les règles élémentaires du droit.
En réalité, on a le sentiment que les américains projettent sur cette image ce
qu'ils pensent désormais du conflit. Cette photographie a obtenu le prix Pulitzer
en 1969, mais son auteur Eddie Adams, rappelle a son sujet qu'il y eu un
malentendu. Il semblerait en effet que la victime de l'exécution ne soit pas un
simple civil mais un combattant vietcong ayant abattu
plusieurs soldats américains (pour
écouter une chronique sur le sujet) Le 27 février 1968, le célèbre journaliste Walter
Cronkite, chroniquer du CBS, finit par reconnaitre que contrairement à ce qu'affirmaient les
autorités la guerre du Vietnam ne serait pas rapidement gagnée et qu'il
faudrait négocier.
c)
L'évolution de l'opinion publique .
Comme le révèlent les sondages de l'institut Gallup (c’est le nom de l’inventeur du procédé dans les années 30), l'opinion publique se retourne dans les années 68-69 et devient majoritairement hostile à l'intervention. En 1969, débutent les premiers retraits des forces américaines. Cela n’empêche pas le massacre de My lai
(entre 347 et 504 morts) par les hommes du lieutenant William Calley en mars 69. L'affaire devient publique en novembre 69III Mais il
convient de nuancer et de préciser le rôle des médias dans ce conflit.
a)
D'abord, les médias américains n'étaient pas unanimes sur le conflit.
b) Par ailleurs l'impact de certaines photographie sur
l'opinion publique doit-être nuancé.
Etude de cas : Napalm Girl de Nick Ut, 1972
Inter iconicité : elle pourrait être définie comme la présence d’une image dans une
autre.