Le programme en 25 points du parti Nazi  (NSDAP) : genèse d’un régime totalitaire.

 

Ce document est un extrait du programme du parti national socialiste des travailleurs allemands (NSDAP). Il est publié à Munich en 1920, c’est-à-dire au moment où nait ce parti sur les cendres du parti ouvrier allemand (DAP). Le contexte est celui des deux ans qui suivent la fin de la première guerre mondiale. La République de Weimar, mise en place dans un contexte troublé, peine alors à s’imposer face aux révoltes de gauche comme de droite. L’Allemagne est par ailleurs confrontée aux exigences du traité de Versailles signé en juin 1919. Sur le plan économique, elle connaît par ailleurs à une inflation galopante.

Le sujet et la nature du document nous invitent à étudier les origines du totalitarisme nazi, ses caractéristiques ainsi que ses bases idéologiques.

 Le NSDAP prospère en se nourrissant du mécontentement lié aux conditions de la défaite. L’article 2 demande d’ailleurs «L’abrogation des traités de Versailles et de Saint-Germain ». A l’issue du premier traité, l’Allemagne est divisée. Elle perd également une partie de ses territoires et de sa population. Des réparations (132 milliards de marks/or) lui sont également imposées. On parle alors en Allemagne du Diktat de Versailles. Les nazis retournent d’ailleurs l’argument du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes », mis en avant par le président Wilson au sortir de la guerre, pour revendiquer « la constitution d’une grande Allemagne » (art.1). Par ailleurs, un certain nombre d’exigences laissent entendre que le peuple allemand est confronté à des difficultés économiques. L’inflation érode le pouvoir d’achat. Une frange non négligeable de la population est pauvre (art 20). Dans ces conditions, avec quelques visées électoralistes, les nazis réclament des augmentations de «pensions de retraite » (art 15). Le NSDAP se développe donc également dans un contexte économique difficile. La dépression des années 30 a, par la suite, aggravé la situation.

Le programme du NSDAP est par définition révélateur du socle idéologique du nazisme. Il s’agit d’un fascisme, c'est-à-dire une idéologie qui fait de la nation, la valeur suprême tout en mettant en avant des revendications sociales. Le nationalisme viscéral des nazis est rappelé par l’expression  «  Grande Allemagne », et par les références multiples au  «peuple allemand ».  Par ailleurs, un certain nombre de revendications ont de quoi séduire les catégories les plus humbles de la population. Les nazis demandent un accès à « une éducation supérieure » pour les enfants issus des catégories modestes (art. 20). Il convient de noter que certaines accusations visent directement la bourgeoisie capitaliste. Dans l’article 11, est dénoncé le mode de vie des rentiers qui tirent leurs revenus de l’usure. Le démantèlement des trusts et des grands groupes commerciaux est demandé à plusieurs reprises (art.16 et 13). Mais le nazisme est avant tout une idéologie foncièrement raciste. Dans un délire éthno-racial, les nazis définissent la nationalité et la citoyenneté  par le sang comme on peut le lire dans l’article 4. Les nazis sont donc violemment antisémites. Ainsi écrivent-ils qu’ « aucun juif ne peut être citoyen ». Cette conception repose sur l’illusion d’une inégalité des races. A ce titre, les nazis estiment que le peuple allemand, peuple supérieur, peuple issu de la race aryenne à droit à un espace vital pour satisfaire ses besoins. C’est la théorie du Lebensraum qu’Hitler a développé à son tour dans Mein Kampf en 1925.  Profondément anti-égalitaire, le nazisme est également anti-démocratique comme on peut le deviner dans la critique du parlementarisme qui marque l’article 6.

En de nombreux ponts le programme du NSDAP annonce la mise en place d’un totalitarisme même si à l’époque aucun régime de ce type n’existe encore. Le  concept de totalitarisme n’est même pas inventé à l’époque.  Cependant, les nazis appellent de leurs vœux un régime à Etat fort. Ils évoquent d’ailleurs dans l’article 25, un « pouvoir central puissant ». Ils envisagent une intervention forte de l’Etat dans l’économie. Ils souhaitent, par exemple, une réforme agraire (art.17). Ils veulent une « nationalisation de toutes les entreprises appartenant à des trusts. » (art. 13). Pour eux, la presse doit être contrôlée. L’Etat ayant un monopole des moyens de communication.  En évoquant la nécessité d’une « autorisation expresse » et l’interdiction de certains journaux (art.23), ils  demandent l’établissement d’une censure. En bien des points, ce programme annonce donc la mise en place d’un régime totalitaire où l’individu s’efface derrière l’intérêt collectif de la nation. C’est ainsi par exemple que l’on peut interpréter le serment de sacrifice de la fin du texte.

Bien avant la mise en place du totalitarisme nazi, ce texte est donc révélateur du contexte de crise politique, économique et morale que traverse l’Allemagne au début des années 20. Il est également le reflet de l’idéologie nauséeuse basée sur le nationalisme et le racisme qui émerge derrière les revendications sociales.  Il jette par ailleurs les bases d’un régime qu’on qualifiera plus tard de totalitaire.