Séries : 1L, 1ES, 1S

 

Titre : Les espaces de production agricole en lien avec les marchés européens et mondiaux

 

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les espaces agricoles français se sont intégrés dans des marchés de plus en plus élargis.  Le GATT puis l’OMC ont créé un marché mondialisé des produits agricoles. Par ailleurs, la construction européenne a mis en place à l’échelle du continent un marché unique et une politique agricole commune (PAC).

 

Problématique : Comment évolue l’agriculture dans un contexte de mondialisation et d’intégration européenne croissante ? Cette évolution détermine-t-elle différentes types d’espaces agricoles ?

 

GATT : Accords généraux sur les tarifs douaniers et le commerce. Précèdent l’OMC.

Marché unique : marché commun européen où les marchandises, les capitaux et les services peuvent circuler librement.

 

I Les espaces  agricoles confrontés à la concurrence et à des exigences …..

a)     …dans le contexte de la mondialisation

La France est une véritable puissance agricole. A titre d’exemple, notre pays et le premier producteur européen et le cinquième producteur mondial de Blé. C’est aussi le deuxième producteur européen et mondial de vin. Pour beaucoup, ces productions sont destinées à l’exportation. Dans le cadre de l’organisation mondiale du commerce (OMC), la France participe aux échanges mondiaux de produits agricoles. Elle est même la deuxième puissance exportatrice de produits agricoles ou agroalimentaires. L’excédent des échanges agroalimentaire de la France était pour 2011 de 11.6 milliards d’euros.  Elle importe cependant également des produits agricoles. Ainsi les productions fruitières et maraîchères françaises sont-elles en concurrence avec les importations en provenance du reste de l’Europe et d’ailleurs. Les espaces agricoles français sont donc intégrés dans un espace économique mondialisé.

 

OMC  (Organisation mondiale du commerce) : compte actuellement 153 pays. Elle cherche à promouvoir le libre échange, à abaisser les tarifs douaniers et réglementer le commerce Elle est actuellement dirigée par le français Pascal Lamy. Son siège se trouve à Genève.

 

b)     ,… et de l’évolution de la Politique Agricole Commune.

Jusqu’au début des années 80, Politique Agricole Commune (PAC) cherche d’abord à faire de l’Europe une puissance agricole capable de satisfaire ses besoins alimentaires. La préférence communautaire, les prix minima garantis, le Fonds Européen d’Orientation et de Garantie Agricole (FEOGA) sont alors autant d’instruments destinés à protéger le marché européen et à encourager le développement d’une agriculture productiviste et intensive. Dans les années 80, les limites de cette politique sont apparues. Elle s’est révélée coûteuse pour le budget communautaire et les situations de surproduction se sont multipliées. En 1992, la PAC fut donc réformée. Cela s’est traduit par une baisse des prix de soutien, la mise en jachère d’une partie des surfaces et l’établissement de limites de production comme les quotas laitiers. En 2003, l’accord du Luxembourg établit les nouvelles bases de la politique agricole commune. L’objectif est désormais de mettre en place une agriculture aussi bien durable que compétitive. Pour cela, les prix de soutien sont à nouveau réduits. Ils se rapprochent désormais des cours mondiaux. La conditionnalité est un autre aspect de la nouvelle PAC. L’exploitant doit respecter un certain nombre de règles en matière de santé publique, de bonnes pratiques environnementales (bandes enherbées) et d’entretien du paysage (maintien des pâturages permanents) pour obtenir les aides. La Politique Agricole Européenne est donc passée d’une logique essentiellement basée sur l’intensification de la production agricole associée à un revenu satisfaisant pour les agriculteurs à une logique mettent en avant compétitivité, qualité, respect de l’environnement, développement durable, aménagement des paysages. On peut se demander s’il est vraiment possible de concilier tous ces objectifs.

 

Agriculture productiviste : agriculture basée sur la recherche de rendements élevés au détriment parfois de la qualité.

Jachère : terre labourée laissée au repos.

 

II …s’adaptent…

 

a)     …en intensifiant  la production, 

 

Pendant longtemps, l’intensification de la production est passée par une mécanisation et une chimisation de l’agriculture. Le remembrement a également permis l’usage d’engins agricoles volumineux. Les rendements à l’hectare ont augmenté grâce à l’emploi d’engrais de synthèse et de produits phytosanitaires (fongicides, insecticides, herbicides). Dans ce contexte, de nombreuses activités échappent à l’agriculteur. Il est souvent lié à des industries agro-alimentaires qui transforment sa marchandise après avoir défini par contrat la quantité, la qualité et le prix du produit agricole. Dans certains cas, c’est la distribution qui peut imposer ses conditions (prix, qualité, calibre, conditionnement) afin de satisfaire le cahier des charges lié à leurs gammes de produits. On observe donc une tendance à l’intégration. L’agriculteur a donc parfois le sentiment de ne plus être que le propriétaire de l’outil de travail, obligé de se soumettre à des prescriptions techniques contraignantes imposées par le distributeur, l’industriel ou la coopérative. On observe donc la constitution de véritables systèmes agro-industriels.

 

L’optimisation de la production passe aussi par l’irrigation. On observe également une tendance à la spécialisation des exploitations agricoles. La polyculture recule soit par disparition complète des exploitations, soit par spécialisation dans une production. La tendance est donc à la simplification des systèmes agricoles. La spécialisation peut-être un moyen d’amortir rationnellement des investissements coûteux en matériel agricole. Certains voient dans les OGM un autre mode d’optimisation de la production. Ils auraient l’avantage de réduire la consommation de produits phytosanitaires selon les fournisseurs. Le choix des OGM peut aussi être motivé par le marché international. Certains agriculteurs français, limités par un moratoire sur les cultures d’OGM, craignent de se voir dépassés dans la concurrence qui les oppose aux autres producteurs mondiaux. Enfin, les nouvelles valorisations des productions comme la mise en place de filière d’agro carburants (« biocarburants ») peuvent apparaître, à première vue, comme une autre forme d’optimisation de la production en accord avec une logique de développement durable.

 

Polyculture : terme pouvant désigner l’association de plusieurs activités agricoles sur une exploitation ou la coexistence à l’échelle locale d’exploitations spécialisées dans des domaines différents.

OGM : organismes génétiquement modifiés.

Rendements : production par unité de surface, souvent exprimés en quintaux ou en tonnes par hectare.

Agro carburants : carburants d’origines agricole (cultures dédiées, déchets)

Intrants : produits qui entrent en supplément dans le cadre d’une production.

Système agro-industriel : système qui intègre toutes les activités liées à la production agricole de l’amont (fournitures de matériels, d’engrais, de produits phytosanitaires, de semences) à l’aval (transformation, valorisation et commercialisation de la production).

 

Schéma 

 

Remembrement : pratique consistant à modifier le parcellaire et à réduire le morcellement par un regroupement et un échange de terres entre les divers propriétaires et exploitants. Ce processus vise à la simplification des conditions d'exploitation et à une amélioration agricole ou d'utilisation spatiale.

 

 

b)     … en valorisant  la qualité

Dans un contexte de forte concurrence, la mise en avant de la qualité permet de promouvoir les productions. Il existe des appellations d’origine contrôlée (AOC), des labels rouges ou des Appellation d’Origine Vin Délimité de Qualité Supérieure (AOVDQS). L’agriculture biologique offre aussi une alternative à la logique productiviste. L’agriculture raisonnée est une autre proposition. Elle est définie par le ministère de l’agriculture comme une pratique qui vise « au-delà du respect de la réglementation, à renforcer les impacts positifs des pratiques agricoles sur l’environnement et à en réduire les effets négatifs, sans remettre en cause la rentabilité économique des exploitations ». Pour être qualifié, l’agriculteur doit respecter des exigences en matière de respect de l’environnement, de la maîtrise des risques sanitaires, de la santé et de la sécurité au travail, du bien-être des animaux et de protection des paysages. L’utilisation de produits phytosanitaires n’est pas exclue mais contrôlée.

 

c)     …en entretenant le paysage.

La gestion du paysage dans le cadre d’un développement rural est l’un des piliers de la nouvelle PAC. Dans les montagnes, une partie de l’élevage  subsiste grâce aux subventions versées dans cette logique. Un certain nombre de zones bénéficient de primes herbagères agro-environnementales (PHAE). Les pratiques pastorales permettent d’éviter la fermeture du paysage. Des conflits peuvent cependant apparaître lorsque des pratiques agricoles cohabitent avec des programmes environnementaux.  Dans les Pyrénées, c’est la cohabitation entre l’ours et le pastoralisme qui est parfois problématique.

 

III ….non sans problèmes….

 

a)     liés à l’environnement …

L’intensification des productions a donné lieu à des problèmes de pollution majeurs. Notre secteur a connu il y a quelques années des problèmes de contamination des nappes phréatiques par l’atrazine. Le développement des élevages et l’augmentation des épandages de lisiers peuvent provoquer dans les bassins hydrographiques des phénomènes d’eutrophisation. En Bretagne, la forte concentration de nitrates dans les effluents agricoles provoque des « marées vertes ». Les OGM posent également  un certain nombre de questions. Il est à ce jour difficile de garantir l’absence de répercussions des OGM sur la santé publique et sur l’environnement. Les possibilités de dissémination font craindre pour le devenir de filières agricoles de qualité. Il n’est pas prévu, à l’heure actuelle, d’indemnisation en cas de contamination des champs et des productions d’un agriculteur « non OGM ». Les agro carburants posent aussi problème. Sur une planète où les besoins alimentaires augmentent avec la croissance démographique (7 milliards d’humains), on peut s’interroger sur la pertinence de telles orientations agricoles. Pour substituer 10 % d’« agro carburants » aux carburants actuels, il faudrait utiliser 43 % des champs américains et 38 % des champs européens.

 

b)     ….et à la viabilité des exploitations.

Adapter son exploitation aux exigences du marché, de la coopérative ou du distributeur coûte cher. De nombreux chefs d’exploitation sont amenés à s’endetter dans un contexte de revenus agricoles en baisse. Dans certains cas les agriculteurs produisent à perte et ne parviennent même pas à dégager un revenu décent. Les situations de surendettement sont courantes et les faillites nombreuses.

 

c)     La  diversification des activités et la simplification des filières peuvent apparaître comme des solutions.

La survie de certaines exploitations est en effet parfois liée à la diversification des activités. Dans certaines campagnes les agriculteurs proposent une offre touristique (gîte, camping à la ferme) et/ou de restauration. Certains agriculteurs cherchent également à réduire le nombre d’intermédiaires entre leurs exploitations et le consommateur en développant la vente directe ou en créant des AMAP.

 

AMAP (Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne)   : C’est une association entre un groupe de consommateurs et une exploitation agricole. Elle garantit le revenu de l’exploitant puisque les achats sont engagés (système des paniers). Le consommateur obtient lui des garanties concernant les modes de production et la qualité des produits.

 

Conclusion : Les agriculteurs réalisent donc de nombreux efforts pour adapter leurs exploitations aux exigences des marchés et de la PAC. Mais tous les espaces agricoles ne peuvent réagir de la même façon. Il est alors possible de distinguer pour faire simple trois grands types d’espaces agricoles.  Il y a des espaces dans les grands bassins ou dans les zones bien exposées où domine une agriculture très rémunératrice qu’elle soit productiviste (grands bassins français spécialisés dans les cultures industrielles) ou de grande qualité avec de faibles rendements mais de hauts revenus (grands vignobles, élevages de qualité exceptionnelle).

Il y a également  des espaces agricoles en difficulté. C’est souvent le domaine de l’élevage, de la polyculture ou de la viticulture qui ne correspond pas à des vignobles prestigieux.

Le plus souvent dans les zones de montagnes se maintient avec le soutien de subventions européennes, une agriculture dont les rendements sont faibles mais qui contribue à entretenir le paysage. Souvent les exploitants ont plusieurs activités, certaines sont en relation avec le tourisme. Dans cette catégorie, les élevages sont souvent confrontés au problème de la cohabitation avec des prédateurs réintroduits ou en phase de reconquête de territoires.

 

Auteur : Nérée Manuel

 

Bibliographie :

CHALEARD J-L et CHARVET J-P., Géographie agricole et rurale, Paris, Belin, 2004.

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ARAMEDY Jean-François, CASEL Thomas. , DAVID Catherine, LABAUME P., LAFFITE Laetitia, LARRIBE Mathieu, PIEUX Philippe, Paysages de Midi-Pyrénées, Toulouse, Editions Privat, 2000.

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DRON D., « Quelques faits concernant les OGM », in Le courrier de l’environnement de l’INRA n° 54, septembre 2007, pp.103-105

JENNAR RM, Menaces sur la civilisation du vin, éditions aden, mars 2007.

Le vin :

 

Dernière mise à jour : 03-12

 

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