Titre : L'organisation et la recomposition des territoires métropolitains
Comment s'organisent les
grandes métropoles ? Comment évoluent-elles ? Quels sont les enjeux de leur
gestion ?
I Les dynamiques à l'œuvre dans les métropoles ....
a) La concentration des
hommes et des activités est un phénomène ancien ...
...qui
définit la ville depuis longtemps. C'est en effet le plus souvent un carrefour où le bâti est continu. Le pouvoir politique s'y manifeste. Les activités économiques sont diversifiées
et nombreuses. Les centres anciens
de toutes les métropoles majeures jouent
encore ce rôle ou gardent dans leur trame la trace patrimoniale de ce passé urbain.
b).... qui se poursuit
actuellement avec une tendance à la densification.
Cela
concerne les activités et la population. Dacca au Bangladesh compte 43.797
habitants au km² en comparaison à Paris, la densité moyenne est de 21.154
habitants / Km². Le besoin d'espace est tel que le coût du foncier augmente. En moyenne à New York, le m² coute 14000$.
Ce phénomène s'observe dans la plupart des grandes métropoles. Le Grand Londres
aujourd’hui c’est 8 899 375 habitants (2018) pour une densité de 5 661
hab./km2.
Densité : nombre d'habitant par unité de surface.
Au moins trois processus
permettent de répondre à ce besoin
d'espace :
c) La croissance verticale.
Pour
satisfaire les besoins de bureaux et de logements de grand standings des gratte-ciel sont érigés. A travers ces
prouesses architecturales, les métropoles
se livrent à une véritable compétition
mondiale. Dans le cadre d'un marketing
territorial qui s'adresse au monde entier, elles inscrivent leur signature
au moyen de la skyline
ainsi dessinée. La City de Londres participe à cette compétition.
Skyline : ligne d'horizon dessinée par les gratte-ciel d'un
CBD.
Marketing territorial : communication destinée à mettre en avant les atouts
des territoires pour les rendre attractifs dans le cadre de la compétition
qu'ils se livrent.
d) La reconversion.
Certains
quartiers anciens font l'objet de réhabilitations.
Il s'agit d'améliorer le bâti existant. A la suite de ces opérations, il
n’est pas rare que le prix du m² à la vente ou à la location devienne
prohibitif pour les plus humbles qui ne peuvent plus vivre dans ces quartiers.
On assiste alors à un phénomène de gentrification.
Quand les bâtiments anciens sont détruits pour céder la place à d'autres on
parle de rénovation urbaine. Ce sont
parfois d'anciennes zones portuaires ou industrielles qui sont ainsi totalement
reconverties ou requalifiées pour le dire autrement. Elles changent ainsi de
fonctions. Elles deviennent des espaces tertiaires,
résidentiels ou récréatifs. On peut donner l'exemple de Canary wharf dans l'est de Londres qui s'impose comme un nouveau centre fonctionnel.
Gentrification :
(de l’Ang gentry : ensemble des nobles non titrés) processus par lequel
certains quartiers le plus souvent centraux, voient progressivement les
populations les plus modestes remplacées par des populations plus aisées.
e) La croissance
horizontale
Le
processus d'étalement urbain se
poursuit dans les grandes métropoles. Il est facilité par le développement des
transports. On observe donc une tendance à la périurbanisation. Des métropoles tentaculaires se développent alors
sur de vastes superficies. Mexico est 10
fois plus vaste aujourd'hui qu'en 1950.Cette extension génère un allongement des déplacements à
l'échelle de la métropole. Dans certains cas, il est nécessaire de créer
carrément des villes nouvelles suffisamment
autonomes pour que les déplacements vers la ville-centre ne soient pas
systématique. C'est pour cela que Navi
Mumbai a été créé en Inde. En Egypte, une nouvelle capitale est envisagée à
60km à l'est du Caire.
Périurbanisation : urbanisation de la périphérie des villes.
Etalement urbain : processus d'extension de l'espace urbanisé au
détriment de l'espace rural.
II ...
confortent la tendance à la fragmentation....
a)...fonctionnelle
On
observe un zonage du territoire avec
une spécialisation des fonctions.
Dans les centres, on trouve des quartiers
d'affaires qui rassemblent des activités économiques et financières de
niveau supérieur. Le Central Business District de New
York, la City à Londres, Bandra Kurla à Mumbaï ou Pudong à Shanghai. Dans les périphéries, on
trouve des espaces aux fonctions
résidentielles. C'est souvent là également que sont reléguées les activités industrielles. Dans certains
cas, l'objectif est d'associer des productions à haute valeur ajoutée à des
centres de recherche et des établissements d'enseignement supérieur. Des pôles technologiques ou technopôles sont ainsi formés. On y trouve également des centres commerciaux ou des malls. Dans la
continuité, ce sont parfois de véritables centres
secondaires qui se forment. Ils peuvent réunir des bureaux, des
établissements commerciaux, des espaces récréatifs. Aux Etats-Unis, on appelle
ces centres secondaires des edge cities. Les
grandes infrastructures, comme les aéroports
ou les parcs de loisirs sont également repoussées en périphérie. Désormais,
les métropoles sont polycentriques.
Polycentrique :
qui comprend plusieurs centres.
Fragmentation fonctionnelle : processus de distinction des espaces selon les fonctions qu'il
remplissent.
b)...et socio-spatiale
des territoires urbains.
Dans
les centre comme dans les périphéries, les métropoles sont marquées par de fortes disparités socio-spatiales.
Selon le niveau de richesse, on habite des quartiers
aisés résidentiels comme kensington à Londres ou des zones d'habitats pavillonnaires
plébiscitées par les classes moyennes ou des quartiers pauvres d'habitat plus ou plus ou moins vétuste et
précaire. Du grand ensemble déshérité
au bidonville en passant par les ghettos, on retrouve ces différentes
formes d'habitat dans les pays du nord
comme dans les pays du sud. Pour l'habitat précaire et informel, au Brésil
on parle de favelas, au Venezuela de ranchos, en Inde de slums. A ce propos, à Mumbaï
en Inde 41 % de la population vit dans des bidonvilles alors que la ville
compte par ailleurs 39 milliardaires. Le plus important d'entre eux est celui
de Dharavi.
Les bidonvilles ont fait leur
réapparition dans les pays du nord. Au total, un quart des urbains dans le monde réside dans des bidonvilles, ce qui
représente près d'un milliard de personnes. Le quartier de Harlem aux
Etats-Unis est l'archétype du ghetto urbain dans le monde. Avec cet exemple on constate que la différenciation des territoires peut
dépendre également de l'origine ethnique. Ailleurs, c'est l'appartenance religieuse qui est
déterminante.
En
résumé, dans les métropoles, la fragmentation
socio-spatiale se renforce. Elle prend dans certains cas la forme d'une
véritable ségrégation.
Fragmentation socio-spatiale : distinction des territoires selon le niveau de vie
ou l'origine de la population.
Ségrégation : séparation volontaire des populations selon
différents critères.
Edge cities : centres périurbains comprenant des bureaux et
différents équipements.
III Enjeux actuels et nouvelles réponses
a) La gestion de l' eau et des déchets
C'est
un point crucial. Qu'il s'agisse de la fourniture
d'eau potable, du traitement des
eaux usées ou de la collecte des ordures, il s'agit de questions de santé publique et de gestion de l'environnement. Si
certaines métropoles conservent la maîtrise de cette ressource, nombreuses sont celles ont fait le choix de concéder cette gestion à des entreprises
privées. De grandes multinationales comme Veolia s'en s'ont fait une spécialité.
Il arrive que le coût de l'eau dans ces conditions devienne prohibitif pour
certains ménages.
b) Les transports
Dans
les grandes métropoles les durées de
trajet s'allongent. A Rio, la distance moyenne d'un déplacement domicile
travail est de 15km en 2016 contre 12 en
2006. $. Pour rendre les transports plus efficients
et pour relier les métropoles entre elles des axes performants sont créés ou envisagés. On peut citer comme
exemple le projet de train supersonique d'Elon Musk dont la megalopolis américaine
devrait bénéficier. Des réseaux circulaires
et transversaux sont créés pour lier
les centres à l'extérieur et pour relier les périphéries entre elles. C'est
l'objectif des nouvelles lignes de métro dans le grand Paris.
c) L'environnement
L'amélioration
du transport avec le développement des mobilités
douces répond aussi à des préoccupations
environnementales. Mais ce n'est pas la seule réponse donnée. Pour limiter
l'artificialisation des sols et réduire les pollutions, des expériences d'éco-quartiers plus respectueux de
l'environnement sont menées dans le monde. Les smart cities , ou villes intelligentes s'inscrivent dans cette logique.L'idée est de consommer moins d'énergie et
permettre dans une certaine mesure une certaine mixité sociale. Hudson Yard à New York est un exemple de
ce type de démarche. A Londres, une ceinture verte est préservée.
d) La sécurité
Dans
les grandes métropoles, nombreux sont les citadins préoccupés par les questions de sécurité. Baltimore
serait la ville la plus criminogène des
Etats-Unis. Sao Paulo a la réputation d'être la ville la plus dangereuse du
monde. Dans ces conditions, la tentation est grande pour les plus riches et
aussi les classes moyennes de vivre dans
des quartiers fermés et sécurisés. Aux Etats-Unis, on parle pour ces
espaces qui peuvent prendre la dimension de villes de gated communities. La logique est ici celle de
l'entre-soi. Au Brésil, on emploie
parfois l'expression condominium pour
désigner ces quartiers. Dans certains cas, les quartiers d'habitat informel
jouxtent ces îlots de prospérité et de sécurité. Il peut arriver que les
autorités procèdent à des expulsions dans les quartiers d'habitat irrégulier
comme à Rio, à l'occasion des jeux olympiques. Sur le continent africain, on
parle de déguerpissement pour
désigner ces procédures.
e) L'administration des
métropoles.
Avec
leur agrandissement tentaculaire les métropoles englobent des villes et des
villages qui jusqu'alors étaient administrativement
autonomes. De nouveaux périmètres de gouvernance
sont redessinés comme le Grand Londres pour permettre une gestion concertée de
tous ces enjeux urbains à la bonne échelle de gouvernance. Cette gouvernance peut faire l'objet de critiques
concernant la légitimité et la compétence des acteurs impliqués.
Gouvernance : mode de gestion plus ou moins formel des
affaires communes.
Conclusion : Avec la poursuite de la concentration des
hommes et des activités dans les villes du sommet de la hiérarchie urbaine, les
métropoles ont tendance à s'étendre et à s'élever. Elles requalifient également
certains de leurs espaces. Au final, on assiste à tout un processus de
fragmentation fonctionnel et socio-spatial. Par ailleurs, les grandes
métropoles sont de plus en plus souvent polycentriques. Les transports, la
gestion des fluides et des déchets, l'environnement restent des enjeux d'une
gouvernance métropolitaine qui doit se faire à la bonne échelle.