Séries : 1L, 1ES

La gestion durable d'un milieu

Etude de cas : Faut-il introduire des ours pour maintenir leur population dans les Pyrénées ?

 

 

Dans les montagnes des Pyrénées, les hommes doivent faire avec la présence de l’ours. Pour une gestion durable de ce milieu, il faut concilier préservation de la biodiversité et développement des activités humaines. Le développement durable ne se définit pas uniquement comme  la volonté de satisfaire les besoins du moment sans compromettre les capacités des générations futures à satisfaire les leurs. Il s’agit aussi de rendre possible dans le même temps la protection de l’environnement, la viabilité  voire l’efficacité économique et enfin la solidarité, la cohésion sociale (voir schéma)  Mais la tâche n’est pas aisée. Car le milieu est un système complexe. On peut le voir comme l’ensemble des éléments naturels (biotope, biocénose, lithosphère, hydrosphère, climat) et humains (activités, aménagements, infrastructures, présence, déplacements, etc) présents dans un espace donnée et en en constante interaction (définition d’un géosystème selon le géographe toulousain Georges Bertrand).

 

Problématique : quelles sont les caractéristiques, les éléments du milieu montagnard pyrénéen ? Quelles sont les interactions observables dans ce géo système ? Quels sont les besoins et les enjeux liés à l’aménagement de ce milieu ? Quelles sont les réponses données aux problèmes rencontrés ? Quels sont les acteurs impliqués dans cette gestion durable ?

 

Biocénose : ensemble des êtres vivants (animaux, végétaux, micro-organismes soit la faune et la flore) présents (Larousse) dans un écosystème.

Biotope : ensemble des éléments non vivants mais naturels (sols, relief climat, cours d’eau) d’un écosystème offrant des conditions de vie constantes ou cycliques aux espèces de la biocénose.

Ecosystème : ensemble des éléments naturels d’un milieu.

Milieu géographique : ensemble des caractéristiques naturelles (relief, climat, etc.) et humaines (environnement, politique, économique, etc) influant sur la vie des hommes (Larousse). 

 

I Un milieu …..

a)     …constitué d’éléments naturels …..

Les montagnes des Pyrénées se sont constituées essentiellement durant l’ère tertiaire, il y a 40 millions d’années  du jeu des plaques eurasienne et africaine. Cette relative jeunesse explique leur altitude. Le  travail de l’érosion et de la glaciation a façonné le relief dans des roches sédimentaires et cristallines souvent plus anciennes (primaire et secondaire). Il en résulte une organisation du milieu étagée. A plus de 2000 m en moyenne, les conifères cèdent la place à la roche et à la pelouse d’altitude ou pelouse alpine. L’exposition au soleil et aux flux atmosphériques détermine également la distinction entre la soulane (soleille, soulan, souleillan, solena) et l’ombrée (ubac, ubaga).

Dans ce biotope se sont développées une faune et une flore spécifiques. La présence de l’ours brun (ursus arctos) est ancienne. Elle remonte à près de 70000 ans.

 

Soulane : versant abrité plutôt exposé au soleil

b)     ,… et humains

En dépit des progrès techniques, l’altitude et les conditions orographiques sont longtemps restées déterminantes dans l’organisation des activités humaines. Elles limitent  la mécanisation et la mise en œuvre de productions agricoles intensives. Les hautes montagnes des Pyrénées sont donc depuis longtemps valorisées par une agriculture pastorale. Le paysage agraire est également marqué par l’étagement. Les activités étant distinctes entre les fonds des vallées, les zones intermédiaires et les estives.

Plus récemment, la pente, la neige, les paysages sont devenus attractifs. Des pratiques de loisirs comme la randonnée ou le ski se sont diffusées. Après quelques expériences limitées avant la seconde guerre mondiale, les stations pyrénéennes se sont développées véritablement dans les années 50 (La Mongie Barèges Saint Lary)  et 70 (Luz-Ardiden-Peyragudes). Ce dernier exemple montre que des acteurs privés sont impliqués dans ce genre d’aménagement puisque c’est un entrepreneur toulousain qui est à l’origine de la création de la station de Peyragudes.

 

Estive : pâturage d’été en haute montagne.

Paysage : portion d’espace analysée visuellement, résultat de la combinaison dynamique d’éléments physico-chimiques (climat, sol, etc), biologiques (faune, flore) et anthropiques ( humains) qui en réagissant les uns sur les autres font un ensemble unique. (Augustin Berque)

Conditions orographiques : conditions liées au relief.

 

c)     …en interaction avec des risques possibles.

Nous avons déjà vu combien les conditions naturelles pouvaient déterminer les activités humaines. Mais, on constate également que ces dernières peuvent avoir un impact positif ou négatif sur le milieu. Dans le domaine de la gestion de l’environnement, le pastoralisme est utile. Ses vertus sont reconnues. Les élevages permettent de lutter contre la fermeture des milieux. Les pentes sont débroussaillées. La pelouse d’altitude nécessaire à la prévention des avalanches est maintenue. Les espèces animales et végétales vivant en milieux ouverts sont conservées. Cependant, là où les troupeaux paissent de façon intensive et répétée, on a observé des phénomènes de surpâturage et d’accélération de l’érosion.

La fréquentation touristique a également des conséquences sur le milieu. Elle génère des pollutions (déchets d’emballages, effluents domestiques). Les activités et les aménagements touristiques peuvent également perturber l’habitat les espèces pyrénéennes, favoriser l’érosion de la terre végétale et défigurer le paysage.  Les retenues d’eau nécessaires à la neige de culture peuvent modifier le débit des cours d’eau et donc le milieu aquatique.

 

II ….géré durablement.

a)     Plusieurs acteurs …..

… interviennent dans la gestion durable du milieu.  L’Etat par exemple, est à l’origine de la création du Parc Naturel National (PNN) des Pyrénées. Il a été relayé par les régions. C’est le cas de la région Midi-Pyrénées et de la région Languedoc-Roussillon à  l’origine des parcs naturels régionaux (PNR) des Pyrénées ariégeoises et des Pyrénées catalanes. C’est lui également qui est à l’initiative de la réintroduction des ours dans les Pyrénées.

Grâce à  différents fonds, dont le programme LIFE-nature, l’Union européenne soutient différents projets. Pour finir, les acteurs privés comme les éleveurs  sont associés à la gestion durable du milieu au moyen d’indemnités compensatrices à handicaps naturels (ICHN) ou de primes herbagères agro-environnementales (PHAE) pour maintenir leurs activités et entretenir le milieu. Par ailleurs, l’Agence régionale pour l’environnement (ARPE), invite les collectivités territoriales et les entreprises en charge de la gestion des stations de ski à respecter un certain nombre de règles permettant de préserver l’environnement.

 

b)     … tentent  de mettre en place une gestion durable du milieu.

Une véritable politique de protection de l’environnement est mise en place. Dans le cœur du Parc Naturel National des Pyrénées, les espèces fragiles comme l’isard, le desman, le grand tétra ou le gypaète barbu font l’objet d’une attention particulière. Concernant l’ours, à la fin des années 80, un projet a été lancé afin d’introduire dans les Pyrénées centrales des ours de la même espèce mais d’origine slovène. Les premiers lâchers ont eu  lieu en 1996 et en 1997 sur la commune de Melles en Haute-Garonne. En 2005, un nouveau renforcement de la population ursjne a été décidé par le Ministère de l’environnement. En 2006, 5 ours de Slovénie ont donc été relâchés. Ces opérations participent au maintien de  la biodiversité dans les Pyrénées. Au total, il y aurait 39 ours dans le massif des Pyrénées (sept2017).

La gestion durable du milieu passe aussi par l’entretien du paysage de haute montagne. Depuis 2006, le parc Naturel National des Pyrénées aide financièrement les exploitants agricoles à maintenir les prairies naturelles de fauche.  Dans le domaine du tourisme,  le conservatoire botanique des Pyrénées, soutenu, entres autres, par l’Union européenne, fournit aux stations de sport d’hiver des semences locales pour revégétaliser les pistes de ski et  lutter contre l’érosion.

La gestion durable du milieu passe également par une information et une sensibilisation du public. C’est l’une des missions du PNN des Pyrénées.

 

Paysages agraires des hautes montagnes. Ils sont marqués par l’étagement et par l’opposition ente adret et ubac. Les conditions d’exploitation limitent les pratiques agricoles. Les estives permettent l’existence d’un pastoralisme le plus souvent ovin dans une logique extensive. Le forêt est également très présente et tend à s’étendre.

Prairies naturelles de fauche : ce sont des prairies ou se développe naturellement une grande variété d’espèces, notamment des herbacées pour ce qui est de la flore. Elles demandent à être fauchées une fois l’an pour se régénérer. Le fourrage ainsi constitué sert à l’alimentation des animaux d’élevage.

Déprise agricole : réduction marquée de l’activité agricole se manifestant souvent par un dépeuplement, un recul de la superficie utilisée par les exploitations agricoles, par une progression des friches et de la forêt.

 

c)     Mais le cas du pastoralisme pyrénéen montre que la question est posée de la cohabitation des activités et de leur compatibilité 

La question de la cohabitation entre pastoralisme et présence de l’ours reste donc ouverte. Le plantigrade est semble-t-il responsable de l’attaque de plusieurs troupeaux. Des bêtes ont été tuées.  Cette été (septembre 2017)  l'ours semble avoir tué plus de 568 bêtes. Ce chiffre est en augmentation.  Il faut cependant  avoir en tête le nombre total de pertes dans les troupeaux chaque année pour des raisons diverses : 25000. Il faut ajouter à cela les bêtes blessées ou disparues. Ces attaques ont également des répercutions tardives sur les élevages lorsque des éléments reproducteurs sont perdus. Le renouvellement du troupeau devient plus problématique. Le manque à gagner pour les éleveurs est évident.. La présence menaçante de l’ours et la surveillance permanente qu’elle rend nécessaire représentent une charge supplémentaire pour un métier déjà très contraignant. Face à ces difficultés supplémentaires, les éleveurs sont cependant soutenus. Il existe des indemnités pour les bêtes perdues( 126 € par bête tuée par l’ours). Il existe également des aides pour le développement de certaines pratiques : le gardiennage et le regroupement nocturne des troupeaux, l’utilisation de chiens Patou, le parcage des troupeaux dans les moments de vulnérabilité. Par ailleurs, la présence de l’ours permet de valoriser certaines productions. Des fromages de brebis sont désormais vendus siglés de l’empreinte de l’ours.  De la viande d’agneaux porte la mention « broutard du pays de l’ours ».

 


Pyrénées : dure cohabitation entre les ours et les éleveurs

Pastoralisme : pratique de l’élevage nomade. En Midi-Pyrénées, les élevages relèvent en général d’une exploitation sédentaire mais, l’été venu, ils gagnent les terres de haute montagne faiblement productives : les estives.

Conclusion : Un milieu géographique ou géosystème est donc un ensemble complexe d’éléments qui interagissent les uns sur les autres. Pour être efficace, pour concilier protection de l’environnement et  activité économique, toute gestion durable du milieu doit donc tenir compte de la complexité de ces interactions et associer les différents acteurs du territoire même si préservation de l’environnement, rentabilité économique et fréquentation touristique peuvent parfois sembler inconciliables.

 

Schéma 1: un géosystème

image005.jpg

Schéma 2 : le développement durable

 

image003.gif

Auteur : Nérée Manuel

Bibliographie :

VEYRET Y., Géo-environnement , Campus , Sedes , 1999
CASSAGNE JP, MEIFFEN Isabelle, Natura 2000 – La lettre semestrielle  n° 15, Préfecture de la Région Midi Pyrénées, février 2008.

COMITE DE PILOTAGE DEPARTEMENTAL NATURA  2000, Bilan des actions 2010 des 3 sites animés par l’ADASEA, novembre 2010.

SIRVEN B, POULLE F. JOFFRE L., Paysages du Gers, Editions du Rouergue, 2004.

BERTRAND C, BERTRAND G, Une géographie traversière : l’environnement à travers territoires et temporalités, Parcours et paroles, Quae, 2002

Dernière mise à jour : 10-17

 

Contrat Creative Commons