Territoire des États-Unis et puissance américaine.

 

Territoire : espace approprié et aménagé par une société.

Comment s'organise le territoire américain ? Cette organisation contribue-t-elle à la puissance américaine ?

 

I Les facteurs structurant de l'espace américain.

a) les facteurs naturels.

Les contraintes naturelles limitent-elles la puissance américaine?

Des contraintes existent, les Etats-Unis sont exposés aux tornades, aux cyclones ( Katrina). Le relief peut constituer un obstacle à l’influence océanique ( à l’ouest du 100ème méridien les précipitations sont moins nombreuses) ou bien même à la circulation.  Mais les facteurs naturels sont loin de limiter la puissance de Etats-Unis.

En effet, les Etats-Unis possèdent par ailleurs des richesses naturelles nombreuses mais inégalement réparties. Ce pays est  souvent aux premières places pour les productions en matière de combustibles, d'énergie et de minerais : troisième rang pour le pétrole, deuxième pour le gaz naturel, le cuivre et le charbon, troisième rang pour l'hydroélectricité, cinquième rang pour le fer. Seulement ces ressources sont inégalement réparties. ( voir croquis)

 

c) les axes, nœuds de communication et interfaces.

L'immensité du territoire est-elle maîtrisée par l'organisation des transports ?

On remarque que le réseau des voies de communication est plus dense et plus complet à l’est qu’à l’ouest.

Avec la colonisation européenne à partir du 17 ème  siècle en particulier, la mise en valeur des Etats-Unis commença à partir d’une interface maritime ( la façade atlantique qui représente aujourd’hui 430 Millions de t de marchandises par/an contre 260 M de t pour le golfe du Mexique et 240 M de t pour la façade pacifique). L’utilisation du réseau hydrographie ( grands lacs, Mississippi- Saint Laurent) permit la pénétration du continent. C’est donc depuis l’est que se développèrent les transports terrestres ( route, chemin de fer) par la suite. Le treillage des axes de communication y est donc plus dense même si le pays est traversé par de grands axes est-ouest (Minneapolis-Seattle ; Saint-Louis -San Francisco; Houston-Los Angeles).

Le système des transports est complété par le trafic aérien (17 % du transport de passagers aux Etats-Unis). On trouve aux États-Unis des aéroports dont les trafics sont parmi les plus importants du monde. ( Atlanta 1er) , Chicago ( 2e) Los Angeles (5e ) en nombre de passagers 2006. Certains de ces aéroports jouent le rôle de hubs.

Hub : plate-forme aéroportuaire vers laquelle convergent les lignes long courrier et les lignes intérieures.

 

II Les disparités de l'espace américain. L'inégale répartition des hommes et des activités.

Comment se répartissent les hommes et les activités sur les 9 363 123 km2 ( Alaska et îles Hawaï compris) du territoire américain ?

a) le peuplement américain et ses dynamiques.

Peuplement : Cette notion peut  désigner la répartition de la population sur un territoire donné. On peut aussi l’utiliser pour qualifier les mouvements migratoires et les phénomènes démographiques à l'origine de l’augmentation de la population. Enfin,  par peuplement, on entend aussi parfois les composantes de la population du point de vue de leurs origines.

 

On observe une inégale répartition de la population américaine. A l'ouest du 100° méridien, les densités sont faibles sauf sur le littoral pacifique. Les agglomérations y sont plus nombreuses. Le semis urbain y est donc plus dense. Sur le littoral atlantique au nord, s'est d’ailleurs formée une mégalopole de Boston à Washington en passant par New York, Philadelphie et  Baltimore que Jean Gottmann  qualifia de "mégalopolis" en 1961 ou de  BosWash. Cette inégale répartition de la population est le résultat du processus historique de peuplement de l’est vers l’ouest.

 

Mégalopole : Vaste région urbaine constituée de plusieurs agglomérations voisines et dépassant généralement 10 millions d'habitants.

Semis urbain : répartition des villes dans l'espace.

 

Des dynamiques de peuplement sont à l’œuvre aujourd’hui encore au Etats-Unis. On observe des départs des régions du nord-est vers les États du sud et de l'ouest dont la population augmente. La population des villes n’augmente pas au même rythme partout. A l’exception de Washington, les villes du nord-est et du centre, perdent de la population ou en gagnent peu, contrairement à celles de l'ouest ou du sud.

 

Dynamiques : On entend par dynamiques les mutations, les transformations d‘un territoire. Quelles aient un caractère positif ou négatif.

 

L'organisation traditionnelle des villes américaines est concentrique : autour d'un CBD " central business District", on trouve des quartiers délabrés parfois réhabilités et des banlieues faites de zones résidentielles, de centres commerciaux et de centres industriels ( Chicago). Aujourd'hui, cette organisation semble céder la place à un modèle polycentrique : les villes ont désormais plusieurs centres qu’on appelle souvent edge cities. Los Angeles offre un bon exemple de ce type d'organisation.

CBD:(central business District) Centre d'affaires au cœur des villes américaines.

Edge cities : terme construit par l'écrivain américain Joel Garreau pour désigner des espaces où se concentrent des bureaux, des centres commerciaux ou de loisirs en dehors du traditionnel centre des villes.

 

Les composantes de la population américaine et leur répartition. La population américaine est aujourd’hui de 300 millions d’habitants. Les hispaniques constituent aujourd’hui la première minorité 14 %, après la population blanche et devant les afro américains 13 %. La communauté est particulièrement bien représentée dans les États du sud et de l'ouest, dans les grandes agglomérations de l'est.

 

La répartition des composantes ethniques de la population américaine est elle le reflet d'un processus historique de mise en valeur des territoires ?

Les amérindiens constituent la population native aux Etats-Unis. Mais la conquête européenne et l'ethnocide dont-ils furent victimes sont à l'origine d'une diminution spectaculaire de cette population qui ne représente plus que 4,5 millions de personnes soit 1,5 % de la population Américaine. Les afro-américains  sont particulièrement représentés dans le vieux-sud américain et dans les agglomérations industrielles du Nord-est à la suite de l'industrialisation. Les Asiatiques (3.5% de la population) plus particulièrement implantés dans les États de la côte pacifique complètent ce peuplement. 

 

Conclusion : de ce point de vue le peuplement américain est le reflet de vagues successives de migrations qui contribuèrent plus ou moins volontairement à la mise en valeur du territoire américain.

 

b) un espace agricole organisé en ceintures spécialisées.

Le potentiel du territoire américain est-il exploité de façon à faire des États-Unis une puissance agricole ?

 

Comme ailleurs dans le monde mais de façon avancée, on observe une forte spécialisation des espaces agricoles pour en tirer le meilleur parti. Les grandes plaines sont des greniers à grain pour les États-Unis mais aussi pour le monde.

L' agriculture américaine est donc organisée en régions spécialisées : les belts. ( Voir croquis)

 

L'espace agricole américain connaît aussi des dynamiques récentes.

L' irrigation permet l'extension de certaines cultures ( canne à sucre , blé, coton) dans le Sud-Ouest aride. Des systèmes industriels d ' élevage comme les feed-lots se sont développés dans les Grandes Plaines et sur les contreforts des rocheuses pour intensifier l'élevage. L'agriculture américaine est d’ailleurs souvent intégrée dans des systèmes agro-industriels qui fournissent les exploitants en intrants, transforment et distribuent la production agricole. Enfin, l'agriculture américaine est une culture aidée par l’Etat. Ceci lui est reproché notamment dans des pays en développement qui cherchent à exporter les mêmes productions dans le monde ou à satisfaire au juste prix les besoins de leurs population. La question du coton malien est une illustration de cette problématique de même que celle du maïs consommé par les mexicains. Donc l'agriculture contribue bien à la puissance américaine. Les États-Unis sont au premier rang mondial pour la production de maïs ; au deuxième rang pour la production de céréales. Leur PIB agricole est supérieur à 100 milliards de dollars, il représente 2 % du PIB américain. Cette puissance est obtenue grâce à la spécialisation agricole, la mécanisation de la production, au recours à des techniques agronomiques intensives (OGM, engrais, hormones) , au développement de l’irrigation et à l'intégration de l'agriculture

 

Feed-lots:parcs d'engraissement des bovins.

système agro-industriel : Système dans lequel l' agriculteur est lié souvent par contrat à des firmes fournissant une partie du matériel , des produits et commercialisant la production.

 

c) déséquilibres et dynamiques de l'espace industriel américain.

Les États-Unis constituent la première puissance industrielle au monde. Comment se répartissent les activités ? Les localisation sont-elles le reflet d'une optimisation du potentiel du territoire américain ou mondial ?

 

La présence de mines de fer (lac Supérieur) de charbon (Appalaches) explique la constitution d'une manufacturing belt dans les régions des grands lacs et du nord-est. Seulement ces activités ont subi à partir des années 70 une grave crise. La manufacturing belt s'est transformée en Rust Belt ( ceinture de la rouille).

 

 Depuis sont apparus de nouveaux facteurs de localisation. Les principaux gisements de matières premières et de sources d'énergie sont actuellement dans l'intérieur du pays (Rocheuses-Grandes Plaines- Mid-continent) ou dans la périphérie (Golfe du Mexique-Alaska) et  les industries ont de plus en plus recours à des produits primaires et sources d’énergie importés. La localisation peut aussi être déterminée par les gisements de matière grise, les grandes universités qui forment des cadres des ingénieurs hautement qualifiés. Des conditions de vie favorables peuvent attirer cette main d’œuvre particulièrement demandée. Le coût de la main d'œuvre est un autre facteur de localisation. Les entreprises américaines cherchent à implanter leurs activités de fabrications là où la main d'œuvre coûte le moins cher, aux Etats-Unis mais aussi à l'étranger.

 

On assiste donc à un redéploiement des activités industrielle. Al'intérieur, on observe un glissement des activités industrielles et de la main d'œuvre vers l'intérieur et surtout le sud et l'ouest. Des activités industrielles se développent également sur les façades maritimes dans les grandes villes portuaires pour profiter des importations de matières premières et de produits énergétiques. On parle de littoralisation ou maritimisation de l'activité industrielle. On assiste également à une internationalisation de la production industrielle américaine.  L'industrie américaine a recours à la main d'œuvre immigrée sur le territoire américain car elle est moins chère et est souvent plus docile. Des entreprises américaines implantent des maquiladoras en territoire américain pour profiter de coûts salariaux réduits et d'avantages fiscaux. Des entreprises américaines délocalisent parfois leurs activités bien plus loin dans les pays en développement. Les grandes multinationales américaines s'associent avec des groupes concurrents d'Europe ou d'Asie. Enfin des entreprises japonaises et européennes investissent des IDE pour produire aux États-Unis afin de contourner les barrières douanières.

 

Littoralisation : Glissement d'activités industrielles vers les façades portuaires.

 

L'organisation de l'espace industriel américain. (voir croquis)

 

d) la métropolisation.

 

Les Etats-Unis comptent trois villes de dimension planétaire qu'on peut désigner comme villes globales ou villes mondiales: New York, Chicago et Los Angeles. Ainsi la bourse de Wall Street et le Chicago Board of trade servent de référence pour l'économie mondiale. Los Angeles est l'une des capitales mondiales de la production audiovisuelle et de l'industrie cinématographique. La métropolisation de l'espace américain. On y trouve  aussi de nombreuses métropoles reliant les régions qu'elles dominent au reste du monde (Boston, Philadelphie, Atlanta, Miami, Dallas, Houston). Le processus de métropolisation est donc également à l’œuvre au Etats-Unis.

métropolisation : tendance structurelle à la concentration des fonctions économiques les plus stratégiques dans les villes au sommet de la hiérarchie urbaine .

 

III Typologie : l'organisation régionale de l'espace américain.

 

Compte tenu de leurs spécialisations, de leurs dynamiques et de leurs contributions il est donc possible de distinguer différents espaces régionaux. 

 

a) le nord-est est un cœur économique concurrencé.

Compris entre les Grands Lacs et la Mégalopolis (quadrilatère Baltimore-Portland-Milwaukee-Saint-Louis), le N-E des Etats-Unis représente 16% du territoire national et 36% de la population américaine. Alors qu’il concentrait 55% de l’emploi industriel en 1971, il n’en représente plus que  42% aujourd’hui. Il a donc été affecté par la crise ( rust belt ) mais il  reste un espace économique majeur. Il fournit encore 43 % de la production industrielle nationale. Il comporte des pôles innovants comme Boston et le Massachusetts Institut of Technology. (MIT).

 

Le Nord-Est reste le premier centre décisionnel, financier et culturel :Il concentre 70 % des sièges sociaux des grandes firmes.

A Washington se trouvent la Maison Blanche, le Capitole, le Pentagone. New-York est la capitale financière du pays avec les sièges sociaux des grandes banques et surtout la bourse de Wall Street. C’est aussi un centre de communication majeur (Time, Newsweek, A.B.C., N.B.C., C.B.S.). C'est enfin une façade maritime importante.

 

b) le croissant périphérique forme un archipel dynamique.

Le croissant périphérique comprend environ 12 États du Sud et de l’Ouest des EU. Il  ne doit pas cependant pas être confondu avec la Sun belt.

 

Grâce en partie au phénomène d'héliotropisme, le croissant périphérique est un espace attractif. Des flux de capitaux , de migrants et de touristes en provenance des États-Unis mais aussi de l’étranger, convergent vers ces régions. Cette région bénéficie également du redéploiement des activités industrielles.  Désormais 40 % des américains vivent dans le croissant périphérique. La zone pacifique réalise 16% de la production industrielle américaine et la zone sud 31 %. On compte dans cet espace de nombreux centres technologique comme la Silicon Valley aux environs de San Francisco. La puissance économique du croissant périphérique repose également sur la production agricole. Le croissant périphérique a également une fonction d'interface avec ces deux grandes façades maritimes actives.(260 M de t pour le golfe du Mexique et 240 M de t pour la façade pacifique.) et sa frontière avec le Mexique.

Le croissant périphérique est organisé en archipel. On peut, en effet, distinguer cinq régions dynamiques :

Le Pudget Sound, un pole informatique et aéronautique en relation avec l’Asie et le Canada voisin.

La Californie , une véritable puissance mondiale qui fut longtemps le modèle de la Sun Belt et la « terre promise » de nombreux migrants.

Le Texas, un état aux ressources variées et nombreuses où se concurrencent deux métropoles.

La Floride, un pôle touristique et financier.

Le Vieux Sud qui, autour d’Atlanta, se modernise.

 

c) la diagonale intérieure : un espace à vocation primaire, nouvellement dynamisé.

La diagonale intérieure est l’espace compris entre le Nord-est et le Croissant Périphérique. Du Nevada au Tennessee, du Dakota du Nord au Nord du Texas (soit une vingtaine d’Etats), c’est un espace constitué essentiellement de vastes plaines et de montagnes, représentant 54 % de la superficie du territoire national.

 

C’est un espace faiblement peuplé (¼ de la population américaine sur 54% de la superficie), traditionnellement conservateur. Sa vocation économique est essentiellement primaire.

Les grandes plaines sont le grenier à grains des Etats-Unis. C’est espace riche en ressources naturelles. on y trouve des minerais (cuivre, plomb et zinc), des sources d’énergie (gisement de charbon du Wyoming -50% des réserves américaines, bassin pétrolier des rocheuses représente, lui, 9% de la production nationale) Les bassins hydroélectriques de la Colombia et du Colarado représentent 65 % de la production hydroélectrique américaine.

 

Mais c'est également un espace dynamisé de l’extérieur.

Les pôles urbains et industriels comme Salt Lake City, Denver, Kansas City doivent beaucoup aux localisations des activités du complexe industrialo-militaire américain dans le contexte de la guerre froide.

La diagonale intérieure bénéfice aussi du desserrement du croissant périphérique. Software valley ( Salt Lake city), Silicon Mountain (Denver), construction aéronautique à Wichita ( Kansas)

C'est enfin une destination touristique importante. De nombreux sites naturels touristiques dans les rocheuses ( parc national du Grand Canyon dans l’Arizona, Rocky Mountains dans le Colorado, Yellowstone (Wyoming)). Des stations de ski dans les Rocheuses. On trouve également dans la diagonale intérieure des villes de loisirs importantes ( Reno et Las Vegas (Nevada))

 

On observe donc un certain dynamisme des Etats de la diagonale intérieure comme le Nevada , le Nouveau Mexique ( augmentation de la population entre 1995 et 2000 supérieure à 39.6 %) , l’Idaho, l’Utah et le Colorado (augmentation de la population entre 1995 et 2000 supérieure à 26.4%) qui connaissent une croissance rapide de leurs populations.

 

d) l'Alaska et les îles Hawaii : des périphéries éloignées.

Ces deux espaces n'ont en commun que la position ultra périphérique, la date d'intégration dans la liste des Etats américains et la fonction militaire.Le peuplement des deux derniers États américains est très différent puisque l'Alaska ne compte que 550 000 habitants et Hawaii 1 millions d'habitants.

L'Alaska produit 1/4 du pétrole américain. On y trouve une base militaire importante. Les ïles Hawaii ont une double vocation touristique et agricole. Elles produisent des bananes ,de la canne à sucre, des ananas. Elles accueillent chaque année 5 millions de touristes. A Hawaii se trouve le poste de commandement militaire américain en zone asie-pacifique.

 

Conclusion:

La richesse et la variété des ressources offertes par le territoire américain contribuent donc la puissance des E-U. On observe que l'exploitation de ces atouts se fait selon une logique d'efficacité et de rentabilité. Le territoire américain et sa gestion contribuent donc à la puissance des Etats-Unis.

Cependant, de nombreux déséquilibres apparaissent dans l'organisation de l'espace américain. Les conditions naturelles peuvent en expliquer certains mais cette diversité est surtout le résultat de mises en valeur décalées dans le temps.