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Titre : L’Asie du Sud et de l’Est : les défis de la population, du développement et de la croissance.

 

L’Asie du Sud et de l’Est est une vaste région s’étendant du Pakistan au Japon. Elle comprend des poids lourds de la démographie mondiale comme la Chine (1.4 milliard d’habitants) et l’Inde (1.3 milliard). A elle seule elle représente 55% de la population mondiale.  L’intitulé nous invite à mettre en relation la population avec la croissance, c'est-à-dire l’augmentation durable de la production de biens et de services. Ainsi formulé, il fait passer au second plan la notion de développement alors que celle-ci est au cœur de toute réflexion démographique. Ce développement peut être défini comme l’amélioration des conditions de vie du plus grand nombre. La croissance y contribue généralement mais elle n’en est qu’un aspect comme l’illustre le calcul de l’indice de développement humain (IDH).

 

Problématique : Quelles sont les caractéristiques et les dynamiques des populations d’Asie du Sud et de l’Est ? Dans cette région du monde, la population est-elle un frein ou un facteur de croissance et de développement ? Les besoins de cette population sont-ils satisfaits par le développement ? D’un point de vue démographique, cette région est-elle homogène ?

 

Démographie : étude des populations humaines et de leurs dynamiques d’un point de vue quantitatif.

 

I La population de l’Asie de l’est et du sud (constat)….

a)     ….est importante mais inégalement répartie…

La population d’Asie du Sud et de l’Est est nombreuse. Avec 3,5 milliards d'habitants, elle représente 55%de la population mondiale sur 17 % des terres émergées. Sa répartition est cependant très inégale. On distingue deux grands foyers de peuplement. Il correspondant à l’Asie méridionale avec notamment l’Inde et à l’Asie orientale qui comprend la Chine. Dans ces zones de fortes densités rurales et urbaines se pose un problème d’exiguïté notamment sur les littoraux. Les aménagements sont nécessaires pour gagner de la place (terre-pleins industriels, aéroports sur îles artificielles). Par ailleurs, les concentrations de populations et d’activités, renforcent la vulnérabilité des territoires face aux aléas naturels et technologiques. Les risques sont donc grands, comme le révèlent les risques d’inondations catastrophiques du Bangladesh. Les foyers de population, où les densités peuvent dépasser les 1000 habitants au km² , dans le contexte d'une transition urbaine dans l'ensemble achevée, ne doivent pas cacher qu’il existe cependant des espaces moins peuplés. La Chine occidentale présente des zones de très faible densité comme le désert du Taklamakan. Les contrastes de peuplement sont donc régionaux et infranationaux.

 

Densité : nombre d’habitants par unité de surface, en général le kilomètre carré.

Foyer de peuplement : région du monde caractérisée par des concentrations de populations et des densités élevées.

Vulnérabilité : désigne les dommages que peut occasionner un aléa sur des enjeux (population, aménagements).

Aléa : événement possible et sa probabilité de réalisation.

Transition urbaine : passage d'une population majoritairement rurale à une population majoritairement urbaine.

 

Schéma risque :

 

b)     La population augmente mais à des rythmes différents.

Dans cette région du monde la croissance de la population est rapide. Mais selon les pays, les dynamiques démographiques sont différentes. On peut distinguer trois groupes de pays :

Le Japon, la Corée du Sud, Hong-Kong, Singapour et Taiwan et désormais la Chine sont désormais caractérisés par une fécondité faible, inférieure à 1,8 enfant par femme en âge de procréer. Cela se traduit par un ralentissement de la croissance démographique et par un vieillissement de la population. Il est avéré au Japon, pays industrialisé. C’est désormais le pays où la proportion de personnes âgées est la plus élevée du monde. Les plus de 65 ans représentent 23% de la population. Gérer le rapport entre actifs et non actifs est un véritable défi pour ce pays qui doit envisager un recul de l’âge de la retraite ou un recours massif à l’immigration. Le vieillissement s’annonce également en Chine, puissance réémergente. En 2050, 1/3 de la population chinoise aura plus de 60 ans. En Chine, par ailleurs, on observe que le sex-ratio est déséquilibré en faveur des hommes (116 garçons pour 100 filles). Il manquerait selon les études entre 30 et 60 millions de femmes. On parle de masculinisation de la population. Elle s’observe depuis les années 80 dans l’ensemble de l’Asie où il manquerait une centaine de million de femmes pour l'ensemble de l'Asie.

Le deuxième groupe de pays est constitué de l’Inde, des Philippines, de la Thaïlande, du Vietnam, de l’Indonésie, du Bangladesh Là l’ISF est supérieur à 2,1 mais inférieur à 4 enfants par femme en âge de procréer. Dans ces pays la population reste relativement jeune.

Un troisième groupe de pays est constitué par des pays où la transition démographique est peu avancée. Il s'agit de l'Afghanistan, du Laos et du Népal par exemple. Démographiquement, les pays en retard de développement ou marginalisés (Afghanistan, Népal, Corée du Nord) se distinguent donc des puissances émergentes et du Japon industrialisé.

 

Mais globalement, l’Asie du Sud et de l’Est amorce ou achève la deuxième phase de sa transition démographique. Comment expliquer cette évolution?

 

http://www.france24.com/fr/20151105-chine-politique-enfant-unique-demographie-ralentissement-economique

 

Transition démographique : passage d'un ancien régime démographique caractérisé par une natalité, une mortalité élevées et un accroissement naturel relativement faible à un nouveau régime démographique caractérisé par une natalité, une mortalité faibles (comme aujourd'hui en dans les pays industrialisés) et un accroissement naturel faible. Entre temps, la baisse précoce de la mortalité et le maintien d'une natalité élevée sont à l'origine d'un accroissement naturel élevé.

ISF (indice synthétique de fécondité) : nombre de femmes en âge de procréer.

Sex-ratio : rapport entre le nombre de naissances de garçons et le nombre de naissances de filles.

 

Schéma 

 

II ….au regard de la croissance et du développement. (mise en perspective)

 

a)     …Les politiques démographiques prennent en compte les contraintes liées à une population nombreuse

 

« C’est une très bonne chose que la Chine ait une grande population ; même si elle se multiplie plusieurs fois, la Chine est capable de trouver une solution et cette solution c’est la production ». Mao Zédong, 1949

 

Si au début des années 50, Mao disait, dans une logique « antimalthusienne », qu’une population nombreuse c’était « une bonne chose » et qu'"une bouche à nourrir c'est aussi deux bras" la politique démographique de la Chine connaît une réorientation, dès 1953 et 1962, avec les premières politiques de limitation des naissances. Il faut attendre 1979, pour que soit mise en place la politique de l’enfant unique. Mais, contrairement à une idée reçue, le comportement démographique chinois change avant. En 1970, l’ISF des femmes chinoises est de 5.8 enfants par femme en âge de procréer. Il passe à 2.3 en 1980. En 1984, cette politique connait un aménagement. Compte tenu des besoins de main d’œuvre, le deuxième enfant est autorisé dans les campagnes. En 2015, la Chine a annoncé la fin de la politique de l'enfant unique. En Inde, également la politique de limitation des naissances se veut radicale. Si aujourd’hui la stérilisation forcée n’est plus de mise, elle est simplement encouragée par les autorités. Elle passe également par une politique éducative. En Inde désormais, l’ISF est de 2.4 enfants par femme en âge de procréer  contre 3.2 en 1976. L’Inde pourrait devenir le pays le plus peuplé du monde en 2035.

 

Malthusianisme : thèse de l’économiste anglais Thomas Malthus (19ème s.) selon laquelle la population augmente plus vite que la production de ressources nécessaires pour satisfaire ses besoins. Dans ces conditions, il faut donc selon lui limiter les naissances.

 

b)     Des politiques de développement cherchent à satisfaire les besoins de la population.

La plupart des pays d’Asie du Sud et de l’Est ont réalisé une véritable révolution agricole de façon à satisfaire les besoins alimentaires des populations. Elle a eu lieu dans les années 50 en Corée du Sud, dans les années 60 en Indonésie et à la fin des années 60 en Chine. En Inde, cette politique a été entreprise dès l’indépendance en 1947, sous la forme d’une révolution verte. Celle-ci était basée notamment sur la mise au point et l’utilisation de variétés à hauts rendements. Elle a permis l’augmentation de la production agricole. L’Union indienne est en principe désormais en situation d’autosuffisance alimentaire. Elle n’a plus besoin de recourir à des importations. Ces politiques connaissent cependant des limites2% des Laotiens sont sous-alimentés. . En Chine, 10% de la population souffre de sous-nutrition. Il reste donc des progrès à faire en termes de développement dans une région qui abrite encore 71% de la population sous-nourrie dans le monde. Par ailleurs, les modèles de développement agricoles choisis ne sont pas toujours durables. La sélection de semences brevetées remet en cause la biodiversité et l’autonomie des petits agriculteurs en situation d’endettement. Les engrais et les pesticides sont à l’origine d’importantes pollutions. L’extension des surfaces cultivées se fait parfois au détriment des écosystèmes naturels.

 

Révolution verte : nom donné à la révolution agricole en Inde depuis les années 50. Elle passe par la mécanisation, l’irrigation, l’utilisation de variétés à hauts rendements (VHR) et la culture d’organismes génétiquement modifiés (OGM). Elle recourt aux engrais et aux produits phytosanitaires.

Développement : amélioration du niveau de vie au bénéfice du plus grand nombre.

 

a)     La population active est cependant un facteur de croissance

Une main d’œuvre importante est cependant un facteur de croissance. Son faible coût est mis en avant par certains Etats pour attirer des capitaux étrangers (IDE). C’est ce que firent les Quatre Dragons (Hong Kong, Singapour, Taïwan et la Corée du Sud) puis les cinq Bébés Tigres (la Thaïlande, l’Indonésie, la Malaisie, Vietnam et Philippines). C’est ce que fit la Chine à partir des années 80. Inscrits dans une logique de dumping social, ces pays devenaient ainsi les ateliers du monde. Aujourd’hui, le coût de la main d’œuvre est relativement élevé au Japon. Il est, en effet, supérieur au coût de la main d‘œuvre française.  Dans les Nouveaux Pays industrialisés d’Asie (NPIA) et en Chine, il augmente également.. Dans ce dernier pays désormais, les salaires augmentent en moyenne de 10 à 15% par an. Cela permet d'augmenter le pouvoir d'achat et d'entretenir la demande intérieure. Mais, ceci explique  aussi la délocalisation d’un certains nombre d’activités vers le Bangladesh, le Vietnam ou d’autres pays de la région où les conditions de travail sont déplorables comme en témoigne la catastrophe du Rana Plazza en 2013, à Dacca au Bangladesh. On ne peut ,dans ces conditions, parler de facteur de développement.

 


Bangladesh: l'enfer de la sous-traitance - 16/05 par BFMTV 

 

http://www.dailymotion.com/video/xzx3lo_bangladesh-l-enfer-de-la-sous-traitance-16-05_news

 

 

Dans ce contexte, les flux migratoires sont dans le même temps le reflet d’un inégal développement et un facteur de croissance. Ainsi en Chine, les migrations internes des mingongs satisfont les besoins de main d’œuvre de la Chine littorale. Cependant, lorsqu’en 2008, la Chine a connu un ralentissement de sa croissance, passant d’un taux à deux chiffres à 8 %, elle a encouragé le retour de cette population flottante dans les campagnes. D’une manière plus générale, l’exode rural accompagne le développement de cette région du monde. La population urbaine y a été multipliée par 5 depuis 1960. Par ailleurs la diaspora chinoise répartie dans l’ensemble de l’Asie du Sud et de l’Est a contribué à la constitution de vastes réseaux de commerce et d’investissement. Ainsi, les Chinois qui représentent 74% de la population de Singapour ne sont pas pour rien dans le dynamisme économique de la cité-Etat.

Le coût de la main d’œuvre n’est pas le seul atout des pays d’Asie du Sud et de l’Est. Ceux-ci donnent en effet la priorité à l’éducation et à la qualification de la main-d’œuvre. Il suffit de voir la pression éducative qui pèse sur les enfants Sud-Coréens et Japonais. L’émigration des étudiants chinois est encouragée. Non pour alimenter la fuite des cerveaux (ou brain drain) au bénéfice des pays du nord, mais dans la perspective du retour de jeunes gens diplômés, qualifiés, formés aux technologies en développement ailleurs. C’est pour cela que fut élaboré le classement des universités du monde de l’université de Shanghai. Quand la politique éducative s’adresse également aux filles, on peut parler de logique de développement grâce à l’élévation générale du niveau de l’instruction. On constate que l’amélioration dans ce domaine favorise le contrôle des naissances et la transition démographique. Malheureusement, les mêmes efforts ne sont pas faits dans tous les pays. Au Pakistan et en Afghanistan, la scolarisation est insuffisante en particulier celle des filles. Ce qui reste un frein au développement.

 

 

Mingong : migrants originaires des régions rurales constituant une population flottante estimée à 20 millions de personnes.

Diaspora : communauté dispersée dans le monde entier.

Dumping social : pratique de certains États consistant à réduire la législation en matière de droit du travail et à accepter un niveau de salaire faible afin d’attirer les investissements d’entreprises étrangères.

 

Conclusion : Il ne faut donc pas réduire la question de la population en la présentant comme un obstacle à la croissance. Certes elle est nombreuse et les politiques de développement peinent à satisfaire des besoins importants. Mais cette population est aussi l’un des atouts majeurs de la région. Le faible coût de la main d’œuvre a longtemps rendu attractifs les pays ateliers de la région. Désormais, son niveau de qualification augmente. Les populations actives des pays d’Asie du Sud et de l’Est s’insèrent donc désormais autrement dans la nouvelle division internationale du travail. Pour finir, si dans cette région du monde, la croissance est avérée, elle n’est pas toujours synonyme de développement et de développement durable.

 

Auteur : Nérée Manuel

 

Bibliographie :

SANJUAN T., Le défi chinois, La documentation photographique,  n° 8064, juillet-août 2008, La documentation française. [CDI]

FOUCHER M. (sd), Asies nouvelles, Atlas géopolitique, Belin 2002. [CDI]

 

Dernière mise à jour : 05/16

 

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