TES
Socialisme,
communisme et syndicalisme en Allemagne depuis 1875.
Proposition
de synthèse.
Le socialisme** désigne l’ensemble des courants de pensée qui, très
attachés au principe d'égalité, cherchent à améliorer le sort des ouvriers, du prolétariat*. Ces courants
proposent souvent la socialisation des
moyens de production par la collectivisation,
la mutualisation ou encore l’étatisation.
Problématique :
comment évoluent le socialisme, le communisme et le syndicalisme en Allemagne
depuis 1875 ? Cette évolution est-elle comparable à celle du mouvement
ouvrier en Europe ?
I
1875-1914 : Les socialismes allemands comme leurs homologues européens
cherchent donc à améliorer le sort des
ouvriers.
A la fin du 19ème siècle,
les ouvriers des ouvriers qui représentent
alors 40% de la population allemande. Cependant, il n’y a pas un mais des socialismes. Ainsi, les socialismes du premier 19ème
siècle sont qualifiés de socialismes utopiques. Le socialisme de Karl
Marx se veut, lui, scientifique et révolutionnaire.
Il entend faire disparaître l’Etat et
les classes sociales après une révolution
et une étape intermédiaire de dictature
du prolétariat. C’est ce socialisme
que l’on appelle communisme.
D’autres socialistes pensent pouvoir améliorer le sort des ouvriers
en participant au jeu de la démocratie
parlementaire. Ces socialistes espèrent ainsi améliorer la législation
sociale. On parle dans ce cas de socialisme
réformiste. Le parti social-démocrate allemand (SPD) qui s’organise à partir de
1875 est d’inspiration marxiste mais
adopte une stratégie réformiste
autour de grandes figures comme Ferdinand
Lassalle et Edouard Berstein. Il s'appuie sur un puissant syndicat fondé en
1890, l'ADGB (Confédération Générale des
Syndicats Allemands) qui réunit dès 1913, 2,5 millions d'adhérents.
II
1914-1989 : l'opposition entre socialistes et communistes.
La
première guerre mondiale divise les socialistes en
Allemagne comme dans le reste de l’Europe. Certains, comme Karl Liebknecht, pensent dans une logique internationaliste qu’il faut empêcher la guerre par tous les moyens. Il refuse d’ailleurs de
voter les crédits de guerre. D’autres
donnent la priorité à la défense de
la patrie et participent à un gouvernement
d’union nationale. Cette division éclate au moment où s’effondre l’Empire à
la fin de la première guerre mondiale en 1918. Le SPD, parti socialiste réformiste fait le choix de la démocratie parlementaire à travers la République de Weimar tandis que les socialistes révolutionnaires comme Karl Liebknecht et Rosa
Luxemburg autrement dit les spartakistes,
tentent de créer une République des
Conseils sur le modèle bolchevik russe. Ce mouvement révolutionnaire est sévèrement réprimé par le gouvernement dirigé par les socialistes du SPD au
cours de la «semaine sanglante» en
janvier 1919. Socio-démocrates et
révolutionnaires marxistes deviennent donc désormais des ennemis
irréconciliables. Les socialistes révolutionnaires fondent le parti communiste allemand (KPD).
Cette
division favorise l’accession au pouvoir du NSDAP, le
parti nazi. Même si son sigle comporte le mot socialiste, c'est un parti d'extrême droite raciste et antisémite
qu'on ne peut pas qualifier de socialiste. A l’issue de plusieurs élections législatives
qui voient progresser le parti nazi alors que SPD et KPD continuent à
s'opposer, Hitler est nommé chancelier
en janvier 1933. L’incendie du
Reichstag en février 1933 donne aux nazis le prétexte d’interdire le KPD et d’établir une dictature à parti unique. Les
opposants socialistes et communistes sont victimes de la répression nazie
et enfermés dans des camps de
concentration.
Après la seconde guerre
mondiale, l’Allemagne est occupée de
façon quadripartite par les vainqueurs du La crise du blocus de Berlin en 1948-1949 aboutit à la partition du
pays en deux Etats, la République
Fédérale Allemande (RFA) à l’ouest
et la République Démocratique Allemande
(RDA) à l’est.
A l’est, le SED (parti socialiste unifié
d’Allemagne) prétend incarner le
socialisme réel. Il représente l’ensemble du peuple dans le cadre d’une démocratie populaire. Les libéraux
parleraient de totalitarisme communiste.
A l’ouest, le SPD participe au fonctionnement du
modèle de l’économie sociale de marché.
Dans ce cadre, de puissants syndicats
comme ADGB participent à la gestion des affaires sociales avec le patronat et
l’Etat. C’est le principe de la cogestion.
III
Le socialisme allemand après la chute du mur de Berlin (1989- nos jours)
Après
la chute du mur de Berlin en 1989 et la réunification allemande en 1990, le SED
est dissout. Avec Gerhardt Schröder,
le SPD prend une orientation plus libérale
en adoptant les lois Hartz IV. On parle dans ce cas
de socialisme libéral. En créant, Die Linke (la gauche), Oscar Lafontaine propose un nouveau
parti attaché aux idéaux d’égalité et de
progrès social.
Aujourd’hui
comme hier, en Allemagne comme en Europe, il n’y a donc pas un mais des
socialismes. Les nostalgiques du
communisme orthodoxes sont désormais moins nombreux. Le SPD prend ses distances vis-à-vis du marxisme et accepte certains des
principes du libéralisme. Depuis avril 2018, c'est une femme Andrea Nahles
qui dirige le SPD. Die Linke reste attaché à un
haut niveau de protection sociale et à une redistribution de la richesse plus équitable. A l'extrême droite,
c'est le parti Alternativ Für
Deutschland (AFD)
qui menace les valeurs démocratiques de la nouvelle Allemagne
Conclusion : Il n’y a pas un, mais des socialismes. Face aux
socialismes utopiques, le SPD s’impose assez rapidement comme référence du
socialisme européen. Cependant dès les origines, ce parti est traversé par des
querelles qui opposent les réformistes aux révolutionnaires d’inspiration
marxiste. Quelques voix discordantes ne l’empêchent pas de se rallier à la
guerre. Mais à l’issue de ce conflit, comme ailleurs en Europe, la gauche
allemande se déchire. Dans l’entre-deux-guerres, cette situation fait les
affaires des nazis dont l’idéologie composite est, avant tout, nationaliste,
antisémite et anticommuniste. Sévèrement réprimés sous le totalitarisme nazi,
les socialistes et les communistes reprennent leurs activités dans l’Allemagne
occupée de l’après guerre. Mais, le pays est vite divisé à l’issue de la crise
de Berlin. Il est le reflet de la division de l’Europe dans un monde désormais
bipolaire. Alors que la démocratie
populaire de RDA prétend incarner le socialisme réel, le SPD participe au
modèle ouest-allemand de l’économie sociale de marché. Des syndicats co-gestionnaires y jouent un rôle important. Finalement,
c’est le mur de Berlin qui s’écroule en 1989 et, avec , le bloc communiste qui
se disloque. Dans ces conditions, le Parti Communiste est-allemand (SED) change
de nom, tandis que le SPD ouest-allemand change de référence idéologique et
accepte certains aspects du libéralisme. Comme dans d’autres pays d’Europe,
ceux qui restent attachés à défendre les travailleurs face aux intérêts du
capitalisme financier et aux excès de la mondialisation ultra-concurrentielle
sont désormais minoritaires. C'est Die Linke qui incarne cette tendance en
Allemagne.
Auteur : Nérée Manuel
Bibliographie :
CONORD
F., Les gauches européennes au XXème
siècle, Armand Colin, 2012. [CDI]
BOGDAN
H., Histoire de l'Allemagne, de la
Germanie à nos jours, Tempus, Perrin, 2003.[CDI]
BRAND
D., DUROUSSET M., Dictionnaire thématique
Histoire et Géographie, SIREY, 1995.
Dernière mise à jour : 04-18