Titre : Médias
et opinion publique
dans les grandes crises politiques
en France depuis
l’Affaire Dreyfus.
(Le professeur ne traite, dans le cadre du cours, que
quelques exemples de son choix)
"Je ne crois aux statistiques que lorsque je les
ai moi-même falsifiées" Winston
Churchill
En
1894, au moment où débute l’Affaire Dreyfus, la III ème République est encore jeune et
menacée. Mais les républicains voient dans l’émergence de l’opinion publique le moyen d’affirmer la démocratie et de la faire vivre. On peut la définir comme
l’expression de la manière de penser la plus répandue dans une société. C’est
un ensemble d’idées, d’avis, de valeurs partagées par le plus grand nombre.
C’est la raison pour laquelle, elle est parfois confondue avec l’expression de la volonté générale, le peuple,
la nation ou la société civile. Ceci explique le souci du pouvoir public qui, en démocratie,
tire sa légitimité du peuple, de la
connaître. Mais, même en démocratie, la tentation est grande également de la maîtriser. Dans ces conditions, les médias, c'est-à-dire l’ensemble des
moyens de diffusion de l’information, prennent une importance considérable. Ils
sont le reflet de l’action publique
et de l’opinion mais ils peuvent
également influencer la société et
le pouvoir. Depuis 1894, la France a
traversé de nombreuses crises politiques
de l’Affaire Dreyfus à Mai 68 en passant par les conflits mondiaux et la guerre d’Algérie. A ces moments là, on
observe une rupture du consensus
démocratique, une remise en cause
des institutions et/ou des valeurs dominantes.
Culture de masse : ensemble
des messages et des valeurs véhiculées par les mass-médias (presse, radio,
télévision, publicité, internet) et autres entreprises culturelles (industries
du cinéma, du disque, parcs de loisirs).
Crise politique : rupture du consensus démocratique ou une remise
en cause des institutions ou encore une contestation des valeurs dominantes,
parfois par tous ces aspects à la fois.
Problématique : quelles relations entretiennent les médias,
l’opinion publique et le pouvoir dans les grandes crises politiques de
l’affaire Dreyfus à nos jours ?
I
1894-1940 : les médias reflètent et contribuent à la division de
l’opinion publique française
a)
Le rôle majeur
de la presse écrite dans l’affaire Dreyfus.
A
la fin du 19ème siècle, la presse écrite est florissante. La loi de 1881, établit fermement la liberté de la presse. La toute jeune
troisième République espère fonder la
démocratie sur une opinion publique
éclairée dans tout le pays. L’école républicaine
définie par Jules Ferry en 1881-1882 permet de développer le lectorat. Les progrès
techniques, comme l’offset ou l’héliogravure, permettent d’augmenter les
tirages, d’en améliorer la qualité et d’en réduire le coût. Dans ces
conditions, en 1880, le tirage de
quotidiens dépasse, en France, les 3 millions d’exemplaires par jour. En 1914,
le Petit Journal sort à 1.4 millions exemplaires/jour. En dehors de quatre à cinq grands titres
généralistes, les 244 titres de 1914 sont essentiellement des journaux d’opinion ou des périodiques spécialisés.
C’est
dans ce contexte que le journal antisémite La
libre parole d’Edouard Drumont révèle en 1894 l’affaire Dreyfus en
annonçant l’arrestation du capitaine. L’affaire ne prend cependant pas à ce
moment là une dimension nationale. C’est la publication du
« J’accuse » (le
texte) d’Emile Zola dans le journal L’Aurore qui lui donne une ampleur supplémentaire. Par cette lettre
ouverte à Felix Faure, le romancier s’expose à des poursuites pour diffamation dans le cadre des limites à la liberté d’expression définies
par la loi de 1881. Il espère ainsi de provoquer un nouveau procès et en
faire une tribune pour la défense d’Alfred Dreyfus. A l’image de l’opinion publique française, la presse se déchire alors entre journaux dreyfusards (L'Aurore,
La petite République, Le Siècle, Le Radical, La Fronde, Le Figaro) et antidreyfusards (La Libre Parole, L'autorité, l'Intransigeant, La Croix, Le Gaulois, Le
Petit Journal). Ces derniers sont le plus souvent mus par un antisémitisme viscéral. Le climat
politique est d'une grande violence. On oublie parfois de dire qu'en Algérie,
les manifestations antijuives dans le contexte de l'affaire Dreyfus font
plusieurs morts. Par ailleurs, la mobilisation pour la défense de Dreyfus fait
émerger la figure de l’intellectuel
républicain engagé comme Anatole France ou Lucien Herr. Tandis que se développent des ligues d’extrême droite comme la ligue
des patriotes du nationaliste Paul Déroulède. A l'opposé, Ludovic Trarieux crée la ligue des droits de l'homme pour
défendre Dreyfus et les libertés fondamentales.
Intellectuel(le) :
désigne ici l’artiste, l’homme ou la femme d’esprit, engagé dans la vie
politique.
Ligue :
association destinée à défendre des intérêts politiques, philosophiques ou
religieux.
b)…Elle est contrôlée pendant la première guerre mondiale dans le cadre d’une guerre totale (HS)
Le
deux août 1914, un décret donne aux autorités militaires le droit de suspendre
toute publication périodique. Pour cela un «bureau
de la presse» est créé au Ministère
de la guerre. Chaque journal est dans l’obligation
d’envoyer un exemplaire du numéro à tirer (morasse). Les articles sont
alors caviardés ou interdits de publication. Une véritable censure (Anastasie) s’abat
donc sur les journaux qui cherchent à informer réellement les lecteurs alors
que d’autres participent, au contraire à l’entreprise de « bourrage de crâne » destinée à mobiliser l’opinion
publique et à éviter que le défaitisme
ou le pacifisme ne la gagnent.
Mais
certains journaux résistent à cette tentative. C’est le cas du Canard Enchaîné qui s’engage
malicieusement dans son premier numéro en 1915 à ne diffuser après vérification
que des «nouvelles rigoureusement
inexactes», se soustrayant ainsi, en principe, à la censure. Par ailleurs des soldats, s’emparent de moyens à leur
disposition pour diffuser des journaux de tranchées qui témoignent de leur état
d’esprit. Les tirages de certains de ces journaux (La Mitraille, Le Bochofage) ne sont pas
ridicules.
c)
Dans les années
30, la presse contribue à la crise politique
Dans
les années 30, la troisième République traverse une crise politique profonde. Les députés sont éclaboussés par l’affaire de
l’escroc Stavisky. La presse n’est pas épargnée d’ailleurs puisque ce dernier
contribue à la financer par la publicité (1.1 millions de francs). Lorsque
certains journaux révèlent que Stavisky
bénéficiait du soutien d’élus radicaux pour garantir son entreprise,
l’affaire devient un scandale
politico-financier. La presse d’extrême-droite en profite pour entretenir l’antiparlementarisme croissant dans l’opinion publique. La légitimité de la République est alors
remise en cause par les royalistes, les nationalistes et les partisans d’un
modèle totalitaire à l’Allemande ou à la Soviétique. C’est dans ce contexte que
des ligues d’extrême-droite et des
associations d’anciens combattants de différentes sensibilités appellent à
la manifestation le 6 février 1934. En fin de journée le rassemblement dégénère.
Le réseau d’Etat de la radio n’interrompt pas son programme musical pour en
rendre compte. Mais le lendemain les agitateurs sont qualifiées de « gens
sans aveu, des repris de justice et de souteneurs ».
Coup d’Etat ? Manifestation qui
dégénère ? Entreprise séditieuse ? On discute encore sur la nature de cet événement mais il est sûr que
c’est sous la pression des journaux d’extrême droite et de
l’« Humanité » que le président du Conseil, Edouard Daladier
est amené à démissionner le jour même de son investiture. Même si la 3ème République n’est pas
renversée, l’évènement est
suffisamment grave pour y voir une tentative de déstabilisation. Ceci explique le souci, par la suite, du Front Populaire de maintenir le
contrôle d’un média de masse en développement : la radio. On compte alors
près de cinq millions de postes dans les foyers français. Il est peut-être
intéressant de signaler également que, précédemment, c’est une loi de 1935, qui
définit en France le statut du journaliste. En Allemagne, au même moment, Goebbels,
fait de la radio l’instrument privilégié de sa propagande.
Face
au gouvernement de Front Populaire qui unit radicaux et socialistes de la SFIO,
avec le soutien des communistes, la presse d’extrême droite multiplie les tentatives de déstabilisation. Déjà en 1935, le monarchiste Charles
Maurras appelle ses lecteurs de L’Action
Française à « fusiller [Léon Blum] dans le dos », pour le
seul motif qu’il est juif. En 1936, le journal Gringoire, accuse, à tort, le Ministre de l’Intérieur Roger
Salengro, d’avoir déserté pendant la première guerre mondiale. Il se
suicide. La presse d’extrême droite
cherche donc à mobiliser l’opinion publique contre le Front Populaire et la
République.
Coup d’état :
prise de pouvoir non conforme aux règles définies par la constitution.
Sédition :
soulèvement contre l’autorité établie
Antiparlementarisme : contestation de la légitimité du système parlementaire
républicain.
II ….Entre tutelle et émancipation, l’évolution des
médias et de l’opinion publique en France de 1940 à nos jours
a)
Sous
l’occupation et le régime de Vichy, les
médias sont …
….muselés. En mai 1940, la France est
rapidement vaincue à l’issue d’une bataille préparée entre autres par une
campagne d’intoxication menée depuis Radio
Stuttgart par les Allemands. C’est sur les ondes que Pétain s’adresse le 17 juin 1940 à la Nation pour
dire qu’il faut cesser les combats. A cette occasion, « le héros de
Verdun » prétend sauvegarder les intérêts et la souveraineté du
pays en faisant « à la France le don de [sa] personne ». Il se
sert ainsi du média pour légitimer son pouvoir en créant un lien privilégié
avec les 40 millions de français. Mais,
les actes constitutionnels du 11
juillet 1940 établissent une dictature :
l’Etat Français. La presse est alors
censurée. Le papier à imprimer est distribué de façon contrôlée et limitée. Une
partie des médias de l’époque sert la
propagande de l'occupant, du Régime de Vichy et sa Révolution
nationale. C’est le cas notamment de Radio Paris en zone occupée et de Radio Vichy en zone sud. Le cinéma est
également mobilisé. Ainsi en 1941 est crée l'Institut
d'Etude des Questions Juives qui diffuse une violente propagande
antisémite.
……
Cependant, c’est également par la Radio, sur les ondes de la BBC que le général
De Gaulle tente de rallier, dès le 18 juin 40, les Français à la résistance. Si
l’entreprise semble aujourd’hui légitime,
elle n’est en rien légale. Il n’est
plus sous-secrétaire à la guerre et à la défense nationale. Il a toutes les
peines du monde à se faire reconnaître par les alliés. Son appel est entendu
par une toute petite minorité de Français. C’est le cas de Jeanine Morisse. Avec 15 camardes d’une vingtaine d’année, elle
prend l’engagement dès le 18 juin 1940 dans une des salles de l’actuelle
médiathèque d'Auch, de s’opposer à l’envahisseur et elle intègre un réseau. Par
la suite, la BBC octroie à De Gaulle et à ces compagnons une émission
quotidienne : «Honneur et Patrie» puis «Les français parlent aux
français». Elle fait de la contre-propagande
en répétant « Radio Paris ment, Radio Paris est allemand ». La radio
joue ensuite un rôle majeur dans la
mobilisation et l’organisation des forces de résistance. Dans le Gers, les
hommes du Corps-Franc Pomiès, par exemple, reçoivent
par la BBC des messages codés annonçant les parachutages. En zone nord comme en
zone sud, la diffusion clandestine de
tracts et de journaux est l’une des premières formes de résistance dès
1940. Elle cherche à mobiliser les Français contre l’occupant et Vichy. On peut
citer certains de ces journaux
autour desquels se structurent d’ailleurs parfois des groupes armés (La voix du
Nord, Défense de la France Les cahiers de Témoignage Chrétien, Combat,
Franc-tireur). Dans le Gers, les « Cahiers de Libération » sont
clandestinement par l'Imprimerie Moderne. C’est dans ces conditions que le Chant des partisans est imprimé pour la
première fois en septembre 1943. Mais le personnel de cette imprimerie est
arrêté par la feldgendarmerie, le 11 décembre 1943.
les résistants s’en prennent aux vecteurs de la propagande nazie et
collaborationniste : le 1 mars 1943, des résistants de la 35ème
brigade FTP-MOI Marcel Langer déposent une bombe au cinéma « les
Variétés » à Toulouse. Celui-ci diffusait des films pronazis et
antisémites comme le "Juifs Süss" . Les
médias sont donc largement utilisés pour mobiliser pour l’un ou l’autre des
camps en présence dans le cadre de cette guerre
totale.
Légalité : caractère d’un acte ou d’un fait conforme à la
loi (Encyclopedia universalis)
Légitimité : caractère d’un pouvoir tel que reconnu par ceux
sur qui il s’exerce. Caractère d’un acte tel qu’accepté par un groupe.
Propagande : action systématique exercée par les pouvoirs publics
sur l'opinion pour lui faire accepter certaines idées ou doctrines, notamment
dans le domaine politique ou social (Larousse)
b)
Dans le
contexte de la guerre d’Algérie, ils ….
…relaient la présentation officielle de
ce qu’il convient d’appeler à l’époque «les évènements». Nous sommes encore
sous la 4ème République.
L’Etat contrôle la RTF créée en
1949. La plupart des journaux reprennent le discours officiel du gouvernement de la métropole concernant le maintien
de l’Algérie française.
Cependant
une justice d’exception est mise en
place et la torture est pratiquée
contre des militants ou des sympathisants de l’indépendance algérienne. Des
voix s’élèvent alors en France pour dénoncer
la barbarie et informer l’opinion publique sur ce qui se passe vraiment en
Algérie. Elles s’expriment notamment dans les colonnes de Témoignage Chrétien, L’observateur et L’Express fondé en
1953 par Jean-Jacques Servan-Schreiber et Françoise Giroux. Le
conflit durant et le contingent étant mobilisé, progressivement, l’opinion publique devient moins unanime
sur la question algérienne.
En
13 mai 1958, à l’annonce de la désignation à la présidence du conseil de Pierre
Pfimllin réputé favorable à des négociations avec
le FLN, des militaires d’Alger mettent en place un comité de salut public et font appel à De Gaulle pour maintenir
l’Algérie française. Une fois de plus, ce dernier estime que l’intérêt supérieur de la nation prime sur la légalité. Son accession au
pouvoir peut donc être interprétée comme un coup d’Etat ou comme un pronunciamento. Mais les actualités filmées de l’époque ne
le disent pas :http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu00069/l-arrivee-au-pouvoir-de-charles-de-gaulle-en-1958.html
et De Gaulle se défend le 19 mai devant les médias en affirmant : http://www.ina.fr/video/I00012921/charles-de-gaulle-et-la-carriere-de-dictateur-video.html
Michel Debré rédige alors pour
lui la constitution de la 5ème
République adoptée par référendum
par les français. La radio est alors, le
média dominant.
Pronunciamento : mot d’origine espagnole désignant
l’intervention de l’armée dans l’évolution de la ligne politique d’un pays.
c)
Dans le sillage
de mai 68, les médias audiovisuels restent les instruments du pouvoir ….
….du pouvoir. Alain Peyrefitte qui fut
plusieurs fois Ministre de l’Information est alors perçu comme celui qui dicte
le contenu des journaux de la RTF puis de l’ORTF à partir de 1964. Pierre Viansson-Ponté écrit alors dans son éditorial du Monde : « La France
s’ennuie ». Pourtant, fin avril début mai 1968, les premiers incidents
éclatent à Nanterre. Ils sont suivis dans la nuit du 10 au 11 mai, une première
« nuit des barricades » donne lieu à des affrontements violents au
Quartier latin.
Le
mouvement étudiant remet en cause le
système éducatif et les valeurs de
la société de l’époque. Les médias n’échappent
pas à la critique. Guy Debord et les situationnistes considèrent que la société du spectacle est une entreprise
d’aliénation des masses. Sous
l’impulsion de certains militants d’extrême gauche (maoïstes, trotskistes, etc…), la crise
prend, le 13 mai, une tournure sociale avec le ralliement d’une partie du monde ouvrier. Les syndicats et partis
de gauche traditionnels peinent à
contrôler le mouvement. Fin mai, De Gaulle sait utiliser les médias pour
rétablir la situation. Il orchestre son absence où ses interventions. Alors
qu’en 68, déjà 62% des ménages sont équipés de postes de télévision, il utilise la radio qui l’a bien servi pendant
la guerre pour annoncer la dissolution
de l’Assemblée nationale et conforter ainsi sa majorité.
Son
autorité renforcée, il met fin à la crise de 68.
….et des militants. L’esprit de mai
demeure cependant comme l’illustre le mouvement des agriculteurs du Larzac dans
les années 70. Par des moyens légaux ou
pas, ils ont imposé à l’opinion et aux pouvoirs publics la légitimité de leur combat. Pour cela,
ils mobilisent largement la presse, les affiches et le cinéma militants.
Pour compléter : http://www.ubiqwity.com/ubik1/ubik1access/cahiers/terminale/histoire/republique/Mai68.html
Maoïsme :
version du communisme selon laquelle la mobilisation politique des masses
notamment paysannes doit permettre le développement.
Trotskisme :
le trotskisme est un communisme qui se définit par opposition au totalitarisme
stalinien et qui souhaite une révolution permanente et mondiale.
Situationnisme : mouvement intellectuel révolutionnaire de gauche qui mobilise les arts
afin de changer la société pour la rendre égalitaire.
Aliénation :
asservissement et perte du libre arbitre.
d)
... qui se
désengage à partir des années 70, cédant la place à d'autres acteurs.
En 1975, l'ORTF est démantelée. En 1981, les
radios « pirates » ou radio libres qui émettaient
illégalement sont autorisées à diffuser. En 1985, la 5 est confiée à Berlusconi
et dans le contexte de la cohabitation TF1 est privatisée. Dans ce contexte c'est
l’industrie
de l’entertainment qui prospère. Les situationnistes
semblent donc avoir perdu le combat. Si l’Etat se désengage, il estime cependant
nécessaire le maintien d’un organe de régulation sur l’audiovisuel.
Ainsi se succèdent la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle (HACA),
puis la Commission Nationale de la Communication et des libertés (CNCL) puis
le Conseil supérieur de l’Audiovisuel (CSA)
La presse écrite périclite, tandis que la télévision
largement privatisée et diversifiée depuis les années 80, est désormais concurrencée par internet et d’autres supports multimédias. Selon un sondage 2011, 62 % des français interrogés
déclaraient avoir recours aux médias numériques pour accéder à l’information
rapidement. La question est alors posée de savoir si les médias font encore l’opinion. Certes, ils contribuent à conditionner certains modes de consommation et de pensée (publicité, pseudo débats).
Cependant l’opinion publique française, comme dans la plupart des démocraties
conserve un niveau élevé d’autonomie.
Les médias et les instituts de sondage n’ont pas prévu la présence du candidat
du Front National au second tour des élections présidentielles de 2002.
Majoritairement favorables au « oui », ils n’ont pas non plus prévu
la victoire du « non » à l’occasion du référendum sur le traité
constitutionnel européen (TCE) en 2005. On peut également se poser la question
de savoir si l’opinion publique
française s’atomise ou se fragmente
compte tenu de la diversité de l’offre médiatique (internet, TNT, etc)[Dominique Wolton].
Enfin, plusieurs épisodes récents montrent que les médias servent également de caisses de résonnance pour différentes
sensibilités cherchant à s’exprimer et à influencer
les décisions publiques dans le contexte d’une démocratie d’opinion où la communication
l’emporte parfois sur l’action
politique. Ils peuvent parfois relayer de fausses informations, des fake news ou des rumeurs. Pour certains, on
semble entrer dans l'ère de la post-vérité caractérisée par le développement de
la désinformation. Pour en
savoir plus sur ce thème cliquez ici :
Radios libres : radios associatives qui, à
l’origine, contournent le monopole d’ Etat en utilisant illégalement la bande FM, souvent avec du matériel
à bas coût installé sur des toits d’immeubles.
Conclusion : On ne peut donc réduire les médias au rôle de
transmission de l’information. Ils ont également la capacité d’influencer
l’opinion publique. Plusieurs épisodes révèlent que les médias peuvent servir
les pouvoirs publics ou d’autres intérêts, dans les régimes autoritaires comme
dans les régimes démocratiques. Si leur efficacité est réelle en particulier
dans le contexte d’un régime autoritaire, l’opinion publique n’est pas
uniformément sensible à leurs sirènes. Certains peuvent se montrer réfractaires
à la propagande, au discours officiel. Il arrive également que les citoyens
utilisent les moyens à leur disposition pour résister, militer ou tout
simplement assurer la mission qu’à leurs yeux les médias n’ assurent pas.
Auteur :
Nérée Manuel
Bibliographie :
CHAUVAU A., TETART P., Introduction à l’histoire des médias en
France de 1881 nos jours, A. Colin, 1999
RAJFUS M., La censure
militaire et policière, Le Cherche Midi, 1999.
MARTIN T., Documents pédagogiques « Le conflit
entre Légalité et légitimité », Académie de Poitiers, Lycéens au
cinéma, 09/01/14, http://ww2.ac-poitiers.fr/daac/spip.php?article1012
Brunner Gérald, La démocratie des crédules, PUF, 2013.